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Explication d'un texte d'Aristote : l'opinion des philosophes

Publié le 14/12/2012

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Commentaire d'Aristote sur l'opinion des philosophes « La raison de l'opinion de ces philosophes, c'est que, considérant la vérité dans les êtres, ils ont entendu par êtres les seules choses sensibles. Or il y a dans les choses sensibles beaucoup d'indétermination et de cette sorte d'être que nous avons reconnu plus haut. C'est ce qui explique pourquoi l'opinion en question, tout en n'étant pas l'expression de la vérité, n'est cependant pas sans vraissemblance (appréciation d'une plus grande justesse que celle d'Épicharme sur Xénophane). De plus, ces philosophes, voyant que toute cette nature sensible était en mouvement, et qu'on ne peut juger de la vérité de ce qui change, pensèrent qu'on ne pouvait énoncer aucune vérité, du moins sur ce qui change partout et en tout sens. Cette manière de voir s'épanouit dans la plus radicale de toutes les doctrines que nous avons mentionnées, qui est celle des philosophes se disant disciples d'Héraclite, et telle que l'a soutenue Cratyle ; ce dernier en venait finalement à penser qu'il ne faut rien dire, et il se contentait de remuer le doigt ; il reprochait à Héraclite d'avoir dit qu'on ne descend pas deux fois dans le même fleuve, car il estimait, lui, qu'on ne peut même pas le faire une fois ! - Nous répondons à cet argument que l'objet qui change, quand il change, donne assurément à ces philosophes quelque raison de ne pas croire à son existence. Encore cela est-il douteux, car, enfin, ce qui est en train de perdre une qualité possède encore quelque chose de ce qui est en train de se perdre, et, de ce qui devient, quelque chose doit déjà être. En général, un être qui périt renfermera encore de l'Être, et, s'il devient, il est nécessaire que ce d'où il vient, et ce par quoi il est engendré, existe, et aussi que ce processus n'aille pas à l'infini. Mais passons sur ces considérations ; disons seulement qu'il n'y a pas identité entre changement quantitatif et changement qualitatif. Que selon la quantité, les êtres ne persistent pas, soit ; mais c'est d'après la forme que nous connaissons toutes choses. « Aristote, Métaphysique, ?, 5, 1010 a 1-25 (trad. J. Tricot, Vrin, pp. 222-224) ?Le livre ? de la Métaphysique débute par une affirmation selon laquelle « il y a « bien une science de l'être en tant qu'être, qui est l'objet de la recherche du philosophe, mais cela ne veut pas pour autant dire que celle-ci soit d'ores et déjà trouvée, et il est nécessaire de poursuivre encore la recherche. Cependant, alors que les trois premiers chapitres tentent de déterminer l'objet de cette science et en quoi elle se différencie des autres sciences, Aristote en vient très rapidement, à partir de ?4, à la mise en place d'un ensemble de réfutations, destinées à établir un axiome fondamental, qui est celui du principe de non-contradiction, énoncé en ?3 (1005b19-20) : « il est impossible que le même attribut appartienne et n'appartienne pas en même temps, au même sujet et sous le même rapport «. Ce principe, qui est le plus ferme de tous, ne peut être démontré, car il s'agirait alors d'une pétition de principe, mais ceux qui le refusent demandent parfois une démonstration, montrant par là leur ignorance même de son statut. Pourtant, si l'on ne peut démontrer les axiomes, il est cependant possible de les établir par une série de réfutations, qui débutent en ?4 et qui sont de deux ordres. Le premier exposé, qui concerne ?4, concerne la théorie de la signification, montrant qu'il suffit que le contradicteur dise simplement quelque chose pour que le principe soit établi. Une autre forme de contestation surgit cependant en ?5, représentée par la figure de Protagoras, qui reprend ce que Platon disait de lui dans le Théétète, où il est présenté prônant le relativisme de la vérité : « Ainsi contestée universellement, la vérité de Protagoras ne sera donc vraie pour personne : ni pour un autre que lui, ni pour lui « (171c). L'opinion de Protagoras n'est pas propre à cet auteur, mais est aussi, selon Aristote, celle de Démocrite, d'Empédocle, de Parménide, d'Anaxagore et même d'Homère, c'est une opinion commune aux physiciens. Ils ont cru, voyant le changement dans les sensibles, qu'il pouvait y avoir coexistence des contradictoires, et en sont donc venu à nier le principe de non contradiction. En ?4, ce principe a été établi par la mise en oeuvre d'une réfutation, ou plutôt d'une démonstration élenctique (1006a11-12 ; car, pour qu'il y ait « réfutation «, il faut un syllogisme, Premier analytiques, II, 20), mais la même méthode ne saurait valoir pour des interlocuteurs différents. Au début du chapitre 5, Aristote distingue deux méthodes dans la discussion (1009a17-22), qui sont la contrainte et la persuasion : la première a été utilisée dans le chapitre précédent contre ceux qui ne parlent que par amour du discours (et est reprise en ?6), la seconde est mise en oeuvre en ?5, car il s'agit cette fois de critiquer l'opinion de ceux qui on sincèrement cherché la vérité (1009b33-35) et mis en place une doctrine, et qui, confrontés à une aporie, ont commis des erreurs. ?Ce texte s'articule selon deux grands moments. Dans le premier, qui va du début à « ... le faire une fois ! «, Aristote remonte à la cause de l'opinion concernant les sensibles, et montre à quelles conclusions extrêmes elle aboutit. Dans le second, qui va de « Nous répondrons... « à la fin, il met en place un ensemble de distinctions sur les différents sens du changement, afin de poser sa critique de l'opinion. ?Ce texte apparaît comme un exemple de méthodologie de la persuasion qui apparaît en filigrane à l'occasion de l'examen d'une « opinion « (doxès, 1010a1) concernant les sensibles. Quelle est l'opinion dont il est question ici ? C'est celle des penseurs qui, rangés par Aristote autour de la figure de Protagoras, ont prôné l'existence simultanée des contraires dans les ...
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« personne : ni pour un autre que lui, ni pour lui » (171c).

L'opinion de Protagoras n'est pas propre à cet auteur, mais est aussi, selon Aristote, celle de Démocrite, d'Empédocle, de Parménide, d'Anaxagore et même d'Homère, c'est une opinion commune aux physiciens.

Ils ont cru, voyant le changement dans les sensibles, qu'il pouvait y avoir coexistence des contradictoires, et en sont donc venu à nier le principe de non contradiction.

En 4 , ce principe a été établi par la mise en œuvre d'une réfutation, ou plutôt d'une démonstration élenctique (1006a11-12 ; car, pour qu'il y ait « réfutation », il faut un syllogisme, Premier analytiques , II, 20), mais la même méthode ne saurait valoir pour des interlocuteurs différents.

Au début du chapitre 5, Aristote distingue deux méthodes dans la discussion (1009a17-22), qui sont la contrainte et la persuasion : la première a été utilisée dans le chapitre précédent contre ceux qui ne parlent que par amour du discours (et est reprise en 6 ) , la seconde est mise en œuvre en 5 , car il s'agit cette fois de critiquer l'opinion de ceux qui on sincèrement cherché la vérité (1009b33-35) et mis en place une doctrine, et qui, confrontés à une aporie, ont commis des erreurs.

Ce texte s'articule selon deux grands moments.

Dans le premier, qui va du début à « … le faire une fois ! », Aristote remonte à la cause de l'opinion concernant les sensibles, et montre à quelles conclusions extrêmes elle aboutit.

Dans le second, qui va de « Nous répondrons… » à la fin, il met en place un ensemble de distinctions sur les différents sens du changement, afin de poser sa critique de l'opinion.c Ce texte apparaît comme un exemple de méthodologie de la persuasion qui apparaît en filigrane à l'occasion de l'examen d'une « opinion » ( doxès , 1010a1) concernant les sensibles.

Quelle est l'opinion dont il est question ici ? C'est celle des penseurs qui, rangés par Aristote autour de la figure de Protagoras, ont prôné l'existence simultanée des contraires dans les choses.

Selon eux (1009b), on ne peut décider du vrai par majorité, et, les choses apparaissant contraires à différents individus dans la sensation, et même à chaque individu, le vrai est ce qui apparaît dans la sensation à chaque individu.

De plus, les contraires se succédant dans la chose en mouvement, et rien ne provenant du non-être, ils en ont déduit que les contraires coexistaient dans la chose.

Alors que la démonstration élenctique supposait précédemment une étude de la signification, c'est à partir de l'examen des sensibles que se joue ici la persuasion, et elle s'adresse à ceux qui défendent des opinions de physiciens, auxquels peut être assimilé Protagoras, ainsi que le remarque A.

Jaulin ( Eidos et ousia , Klincksieck, p.

50, n.

63).

Il est important de noter ici la méthode particulière qu'Aristote met en œuvre dès le début de ce passage, car il ne s'agit pas tant de porter le discours sur l'énoncé même de l'opinion que sur sa cause ( aition ), sa « raison », et elle apparaît être une réduction du champ des « êtres » aux seuls « choses sensibles » ( aistheta ), ce qui conduit ensuite à extrapoler abusivement du genre des sensibles à l'ensemble de l'être.

Après avoir vu les conséquences de l'opinion de Protagoras ( 4 , 1007b18-25), il s'agit donc à présent de mettre en évidence sa cause, et celle- ci s'explique du fait de la méconnaissance de l'être en puissance, « que nous avons reconnu plus haut », en 1009a30-36 mais surtout en 1007b28-29.

La conjonction « or » insiste sur le fait que la cause de l'opinion peut être comprise car il y a effectivement de l’ « indéterminé » ( aoriston ) dans les choses sensibles, mais cette indétermination réside dans l'être en puissance de la chose, non dans son être en acte : ainsi, ceux qui croient, comme par exemple Anaxagore, traiter de l'être, s'occupent en fait du non-être particulier qu'être l'être en puissance, qui est l'indéterminé (1007b29).

Selon l'opinion, rien ne peut provenir du non-être et, donc, si la chose peut être elle-même et son contraire, c'est que ces contraires coexistent dans la chose (1009a25-26).

L'être peut cependant se dire selon divers sens, et, par cette distinction il est possible de montrer que la même chose peut être en même temps les contraires selon l'être en « puissance » ( dunamei ) mais non selon l'être « en acte » ( entelekheia ) (1009a32-36).

La cause de l'opinion nous apparaît alors comme double, car à la réduction de l'être aux seuls êtres sensibles vient s'ajouter une ignorance des différents sens de l'être, qui masque le fait que l'indétermination des choses vient de cette sorte d'être particulière qu'est la puissance, qui est aussi, du point de vue de l'acte, un non-être.

Cette recherche de la cause nous apporte néanmoins une meilleure connaissance de l'opinion, de la même manière que la. »

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