Devoir de Philosophie

Faut-il accorder une valeur au désir ?

Publié le 04/03/2005

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                   Les dangers et les illusions du désir   La première partie examinera la position d'une part importante de la tradition philosophique à l'égard du désir : le désir est trompeur et illusoire, et il est nuisible à l'exercice de la pensée rationnelle, d'autant plus qu'il est puissant et convaincant. Il est une force émanant du corps, et cette force vient s'opposer à celle de l'intellect, supérieure mais moins accessible spontanément. Il faut donc refuser de lui accorder de la valeur, de manière à préserver l'intégrité de la raison.   Platon, Phédon   « Socrate - A ressentir avec intensité, plaisir, peine, terreur ou désir, alors, si grand que soit le mal dont on puisse souffrir à cette occasion, entre tous ceux qu'on peut imaginer, tomber malade par exemple ou se ruiner à cause de ses désirs, il n'y a aucun mal qui ne soit dépassé cependant par celui qui est le mal suprême ; c'est de celui-là qu'on souffre, et on ne le met pas en compte !  Cébès - Qu'est-ce que ce mal, Socrate ? Socrate - C'est qu'en toute âme humaine, forcément, l'intensité du plaisir ou de la peine à tel ou tel propos s'accompagne de la croyance que l'objet précisément de cette émotion, c'est tout ce qu'il y a de plus clair et de plus vrai, alors qu'il n'en est point ainsi. Il s'agit alors au plus haut point de choses visibles, n'est-ce pas ?  Cébès - Hé ! absolument.  Socrate - N'est-ce pas dans de telles affections qu'au plus haut point l'âme est assujettie aux chaînes du corps ?  Cébès - Comment, dis ?  Socrate - Voici : tout plaisir et toute peine possèdent une manière de clou, avec quoi ils clouent l'âme au corps et la fichent en lui, faisant qu'ainsi elle a de la corporéité et qu'elle juge de la vérité des choses d'après les affirmations mêmes du corps.

La question « faut-il « porte sur un devoir, que ce devoir vienne de l’extérieur – on a ou on n’a pas le droit de faire telle chose parce que la loi, ou l’opinion publique, ou les opinions de tierces personnes considèrent cette chose comme interdite ou mauvaise –, ou de l’intérieur – on fonde pour soi-même l’obligation ou l’interdiction de telle ou telle chose, après avoir fait une évaluation de cette chose. L’objet concerné ici par ce devoir est le fait d’ « accorder une valeur au désir «. « Accorder une valeur à quelque chose «, c’est lui reconnaître un mérite, une qualité par laquelle elle n’est pas vaine. La valeur d’une chose en effet, c’est son prix, c’est l’estime qu’il faut lui accorder. C’est ainsi d’ailleurs que l’on peut appeler « valeur « en soi un concept, un idéal auquel on attribue un statut de principe important pour la conduite de notre vie. On désigne par désir, enfin, une inclination forte vers un objet, que cet objet soit un bien matériel, une personne ou un idéal. La philosophie s’est souvent montrée méfiante à l’égard du désir, l’accusant d’être aveugle ou irrationnel et de détourner l’homme de l’exercice de la raison. Le sujet invite donc à mettre en doute une position traditionnelle en philosophie, celle qui soutient la vanité et l’absence de valeur du désir. Une alternative se présente alors : ou bien l’on reprend la critique du désir menée par une certaine partie de la tradition philosophique, ou bien l’on en prend le contre-pied pour fonder l’idée de la valeur du désir, ou pour définir les conditions auxquelles l’on doit accorder une valeur au désir – peut-être y a-t-il lieu de définir plusieurs types de désirs, ou encore plusieurs types de rapports au désir, auxquels il faudrait accorder des valeurs différentes. Il faudra préciser également de quel type de devoir il s’agit alors, en considérant ce qui le fonde.

« « Tout sentiment de peine est inséparable du désir de s'en délivrer ; toute idée de plaisir est inséparable du désird'en jouir ; tout désir suppose privation, et toutes les privations qu'on sent sont pénibles ; c'est donc dans ladisproportion de nos désirs et de nos facultés que consiste notre misères.

Un être sensible dont les facultéségaleraient les désirs serait un être absolument heureuxEn quoi donc consiste la sagesse humaine ou la route du vrai bonheur ? Ce n'est pas précisément à diminuer nosdésirs, car, s'ils étaient au-dessous de notre puissance, une partie de nos facultés resterait oisive, et nous nejouirions pas de tout notre être.

Ce n'est pas non plus à étendre nos facultés, car si nos désirs s'étendaient à la foisen plus grand rapport, nous n'en deviendrions que plus misérables : mais à diminuer l'excès des désirs sur lesfacultés, et à mettre en égalité parfaite la puissance et la volonté.

C'est alors seulement que, toutes les forcesétant en action, l'âme cependant restera paisible, et que l'homme se trouvera bien ordonné.

» Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation « Cet effort qui constitue le centre, l'essence de chaque chose, c'est au fondle même, nous l'avons depuis longtemps reconnu, qui, en nous, manifestéavec la dernière clarté, à la lumière de la pleine conscience, prend le nom devolonté.

Est-elle arrêtée par quelque obstacle dressé entre elle et son but dumoment : voilà la souffrance.

Si elle atteint ce but, c'est la satisfaction, lebien-être, le bonheur.

Ces termes, nous pouvons les étendre aux êtres dumonde sans intelligence ; ces derniers sont plus faibles, mais, quant àl'essentiel, identiques à nous.

Or, nous ne pouvons les concevoir que dans unétat de perpétuelle douleur, sans bonheur durable.

Tout désir naît d'unmanque, d'un état qui ne nous satisfait pas ; donc il est souffrance, tant qu'iln'est pas satisfait.

Or, nulle satisfaction n'est de durée ; elle n'est que lepoint de départ d'un désir nouveau.

Nous voyons le désir partout arrêté,partout en lutte, donc toujours à l'état de souffrance ; pas de terme dernierà l'effort ; donc pas de mesure, pas de terme à la souffrance.

[...] Déjà, en considérant la nature brute, nous avons reconnu pour son essenceintime l'effort, un effort continu, sans but, sans repos ; mais chez la bête etchez l'homme, la même vérité éclate bien plus évidemment.

Vouloir, s'efforcer,voilà tout leur être ; c'est comme une soif inextinguible.

Or tout vouloir a pourprincipe un besoin, un manque, donc une douleur ; c'est par nature,nécessairement, qu'ils doivent devenir la proie de la douleur.

Mais que la volonté vienne à manquer d'objet, qu'uneprompte satisfaction vienne à lui enlever tout motif de désirer, et les voilà tombés dans un vide épouvantable, dansl'ennui ; leur nature, leur existence, leur pèse d'un poids intolérable.

La vie donc oscille, comme un pendule, dedroite à gauche, de la souffrance à l'ennui ; ce sont là les deux éléments dont elle est faite, en somme.

De là ce faitbien significatif par son étrangeté même : les hommes ayant placé toutes les douleurs, toutes les souffrances dansl'enfer, pour remplir le ciel n'ont plus trouvé que l'ennui.

» Transition : La seconde partie a examiné un autre élément du concept de désir, celui de manque.

On a donc maintenant deux points d'appui pour refuser d'accorder une valeur au désir.

Cependant, ces deux points d'appuipeuvent être dépassés si l'on ne considère pas le désir comme un facteur de passivité pour l'homme, mais comme unfacteur de son activité.

On ne considère alors plus tant le contenu du désir que son efficace pour l'homme. III.

La valeur motrice du désir et sa fonction constitutive pour l'homme Si l'on envisage l'efficace du désir, sans disqualifier d'emblée son contenu, on peut en arriver à considérer le désircomme une force motrice centrale pour l'homme, voire comme « l'essence même de l'homme », si l'on reprend laposition spinosiste.

On n'envisage alors plus un homme idéal se rapportant à toutes choses à l'aide de la seuleraison, mais l'homme tel qu'il est, et pour lequel le désir tient une place importante.

Le désir devient le moteur del'action, et sa valeur est cruciale parce qu'elle met l'homme en mouvement.. »

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