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La sagesse exige-t-elle de renoncer à la recherche du bonheur ?

Publié le 24/02/2005

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BONHEUR (lat. ougurium, chance, augure, présage)

Le bonheur, si l'on en croit l'étymologie (bon heur), ne peut être que l'effet de la chance, le produit de circonstances favorables. Pourtant, l'eudémonisme ancien prétend faire du bonheur le souverain bien, la fin dernière de notre activité qu'il dépendrait de nous de pouvoir atteindre. Or, cet état de satisfaction complète qui distingue le bonheur du plaisir des sens parce qu'il est toujours accompagné de la certitude de durer semble si difficile à définir qu'on peut le considérer avec Kant comme un idéal de l'imagination plutôt que comme une fin susceptible d'être rationnellement recherchée.

« Nous ne pouvons dire que la sagesse exige de renoncer à la recherche du bonheur qu'en un sens : en entendant parlà qu'elle exige le renoncement à la recherche de toute forme de bonheur qu'elle n'aurait pas entièrement définie.

Eneffet, la sagesse, en tant qu'elle n'a d'autre objet de réflexion que la vie bonne et juste, suppose que le bonheurconsiste dans la pratique de la sagesse.

A l'inverse, les autres définitions du bonheur lui semblent néfastes : lebonheur qui consiste dans l'abondance de bien, l'estime universelle, la domination d'autrui… III. La sagesse ne recherche le bonheur qu'à condition d'en modifier le sens a.

La sagesse dessine une forme particulière de bonheur à atteindre En définitive, le propre de la sagesse n'est nullement d'exiger que nous renoncions à la recherche du bonheur, maisque nous renoncions à toute recherche inadéquate du bonheur, ou, plus précisément, toute recherche d'un bonheurmal entendu.

La sagesse ne définit une forme de bonheur que pour rejeter dans l'erreur et l'égarement toute quêtedu bonheur concurrente.

La sagesse du stoïcien ne peut viser à l'ataraxie sans regarder comme quelqu'un quis'égare celui qui ferait consister son bonheur dans la jouissance de nombreuses femmes.

Ce faisant, la sagessediscrimine le bonheur propre à l'homme du bonheur impropre, alors que le bonheur consiste sans doute moins dansune définition universelle que dans cet accord subjectif et fluctuant d'un homme précis avec la vie qu'il s'est choisie. b.

Le bonheur recherché par la sagesse n'est pas nécessairement ascétique, mais toujours raisonnable Il ne faut pas inférer de cette définition universaliste du bonheur que proposent toute sagesse que la sagesse estnécessairement ascétique.

Le contenu des sagesses diffère, ainsi que leurs définitions respectives du bonheur, si laprétention à définir ce qu'est le bonheur pour tous les hommes leur est commune.

L'Epicurisme n'exige nullement del'homme qu'il macère sa chair ou qu'il souffre pour atteindre une pureté prétendument heureuse, par exemple.

Mais lepropre de toutes les définitions du bonheur par les différentes formes de sagesse est d'être entendu comme soumisà la raison.

La raison apparaît en effet pour l'épicurien comme pour le stoïcien l'instrument adéquat pour découvrirl'essence du bonheur et les moyens de l'atteindre. Epicure nous dit qu'il faut savoir se contenter de peu.

Ainsi, celui qui désiredes mets raffinés risque fort d'être déçu et malheureux s'il n'a pas toujours lesmoyens de se les offrir, ou si le cuisinier rate son plat, ou si mille autresennuis viennent l'en priver.

Avoir des désirs de luxe nous expose à souventsouffrir.

Il faut donc les éliminer.

En revanche, celui qui ne désire que desnourritures « naturelles », un peu de pain par exemple, trouvera facilement àse satisfaire, et peut même en retirer un très vif plaisir s'il a vraiment faim etsoif.

En outre, le sage qui ne désire rien de plus pourra tout de même, s'il estinvité à un banquet, jouir de la nourriture succulente.

De tels plaisirs ne sontnullement interdits, à condition de ne pas les désirer toujours, de ne pas enêtre dépendant.

Il faut donc passer ses désirs au crible de sa raison etéliminer impitoyablement tous ceux qui ne sont pas naturels et nécessaires,tous ceux qui sont vains, artificiels, superflus ou excessifs .

alors nous seronssages et nous atteindrons l'ataraxie, l'état d'absence de trouble de l'âme, cadle bonheur.

En effet, ce sont les angoisses, les passions, les désirs inassouvisqui troublent notre âme, nous font souffrir et nous empêchent d'être heureux.Se délivrer de tout cela, c'est déjà être heureux, de même qu'il faut penserque le plaisir se trouve déjà dans l'absence de souffrance.

Nous voyonsqu'Epicure redéfinit le plaisir (et corrélativement le bonheur) à l'encontre de lapensée commune, qui n'aperçoit de plaisir que dans un excitation positive dessens ou de l'esprit.

Nous voyons aussi quelle est la vraie nature del'hédonisme d'Epicure et quel monumental contresens a fait la tradition en enfaisant « une morale de pourceaux libidineux se vautrant dans la luxure »,alors qu'il s'agit avant tout d'une ascèse, d'une maîtrise des désirs, assezsemblable à ce que peuvent pratiquer certains religieux, ermites ou ascètes, même si c'est dans de tout autresbuts. La philosophie est une discipline ou un art qui procure la santé de l'âme.

Jeune ou vieux, on a toujours intérêt à lapratiquer.

Procurant la santé de l'âme, elle procure le bonheur, et il n'est jamais trop tôt ou trop tard pour y avoirdroit.

L'homme âgé méditera sur le temps passé et les biens qui lui ont été accordés.

L'homme jeune apprendra lecourage et l'intrépidité face à l'avenir.

La philosophie enseigne un bonheur qui ne se trouve pas dans les jouissancesde la vie matérielle ou la consommation effrénée des biens.

Elle éveille la raison, qui permet de bien juger et dechoisir entre ce qu'il convient de poursuivre et ce qu'il faut préférer abandonner.

Rejetant les vaines opinions, elleguérit les troubles de l'âme.

Appréciant et mesurant les justes valeurs de la vie, elle permet d'accéder à la sagesse.L'homme sage est celui qui se tient dans une juste appréciation des dieux : êtres immortels et bienveillants, ils nesont pas à craindre car ils ne se soucient pas de nos bas sentiments humains; il ne redoute pas la mort, car il saitque la vie n'est pas désirable au point de la vouloir éternelle et que sa durée limitée nous incite à en profiter autantqu'il est raisonnablement possible.

La sagesse que vise le philosophe saisit le sens de la vie : un mal extrême ne durepas longtemps et ne cause que des peines légères, tandis que le souverain bien est à la portée de tous.

Guérissantainsi tous les troubles de l'âme, la philosophie nous permet de vivre comme des dieux parmi les hommes.

Si la crainteest ce qui s'oppose en tout premier lieu à la vie philosophique, il ne faudra pas pour s'en délivrer, se mettre en quêted'opinions vaines ou de théories sans raisons, mais d'une doctrine qui engendre l'absence de trouble (ataraxie) : "caril n'y a rien dans la vie de redoutable pour celui qui a compris correctement qu'il n'y a rien de redoutable dans le fait. »

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