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La société est-elle un obstacle à la liberté de l'individu ?

Publié le 24/04/2012

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individu

Ce n'est pas le Prince qui unifie une multiplicité éparse. Le souverain se constitue dans l'acte par lequel les individus s'associent entre eux. L'unité n'est pas préalable à la diversité. De l'union des individus, émane le pouvoir souverain. Car il faut qu'un peuple soit un peuple avant qu'il ne se soumette à une autorité. Et peu importe ici de savoir si la souveraineté est transférée à un tiers comme chez Hobbes, ou si elle demeure immanente au peuple qui s'assemble, comme c'est le cas dans la philosophie de Rousseau.Le corps politique advient à l'être dans le fiai quasi instantané du contrat social. La durée n'apporte rien à la perfection de cette institution originelle. Par là, la figure de l'accroissement paraît plus appropriée que celle de la croissance. Un État peut s'agrandir et accueillir en son sein de nouveaux membres, cela ne change rien à sa nature. La croissance suppose au contraire qu'il faut du temps pour qu'une société arrive à son état d'accomplissement.

individu

« pathologie que relativement au vivant.

Une machine peut se dérégler, elle peut se casser, mais elle ne tombe pasmalade.

La maladie n'a rien de volontaire, ordinairement nous faisons notre possible pour demeurer en bonne santé.Si donc le mal social, lorsqu'il survient, est de nature organique, on ne peut en faire retomber la responsabilité surpersonne.

Les crises et les spasmes qui secouent une société s'expliquent alors par la nature même des choses.

Ilfaut attendre que l'organisme recouvre la santé de lui-même, et nul individu dans la société n'a le droit de s'attribueren propre le mérite d'une telle amélioration.Si l'on se place désormais au plan de l'État politique, mais toujours pouren examiner le fonctionnement, on remarquera que l'analogie se déplace sensiblement de l'image de l'organisme, àl'image plus précise du corps vivant, doté d'organes et non plus simplement de cellules.Chez Rousseau par exemple(Du contrat social, livre III, chap.

11), la puissance législative est assimilée au coeur de l'État, c'est dire qu'elle enest la vie.

La puissance exécutive est, elle, comparée au cerveau, ce qui indique qu'il donne le mouvement.

Hobbes,dans les premières lignes du Léviathan, procède à des analogies comparables, mais en entrant dans un luxe dedétails.

On apprend ce qui tient lieu dans l'État, des articulations, des nerfs, de la mémoire, de la volonté, de laraison, etc.Enfin chez Montesquieu, la théorie de la séparation des pouvoirs peut être interprétée également commele fruit d'un travail de comparaison entre le corps humain et le corps social.

Montesquieu nous fait comprendre sansdoute le mieux la fonction de cette métaphore, car en réalité il y a moins comme cela a été noté, une séparationdes pouvoirs – entre le législatif, l'exécutif et le judiciaire – qu'une combinaison de puissances(Montesquieu, La politique et l'histoire, Althusser).

Chacune ayant pour but de limiter les autres.

Il se forme ainsiune liaison entre les pouvoirs, qui définit une unité organique.Le jeu des comparaisons a pour intérêt de chercher laconfiguration dans laquelle le fonctionnement du corps social correspond dans l'État, au meilleur régime.

Le corpshumain agit d'autant mieux qu'il y a une parfaite coordination entre les facultés qui interviennent dans la réalisationde son mouvement.

Il s'agit d'obtenir le même résultat, en ce qui concerne le corps politique.L'image de l'organismeavait pour effet de diluer le pouvoir, répandu dans chacune des cellules.

Parler de corps social signifie au contrairequ'il existe une localisation et éventuellement un partage de l'autorité.

C'est ce à quoi nous assistons dans un État.Le pouvoir commande à la société comme un organe commande au corps d'agir.

Dans un organisme, le mouvementn'a pas d'origine précise, aucune cellule n'en est davantage la cause qu'une autre.

L'organisme agit de lui-même.

Aulieu que, dans le corps, on peut assigner à un organe propre la fonction de motricité.

Dans un État, il existe desorganes vitaux.

Si le coeur s'arrête, le corps social se décompose et se corrompt.Mais le plus remarquable tient aufait que ce qui commande, commande de l'intérieur.

Coeur ou cerveau, il y a là des organes distincts, pourvus defonctions spécifiques, qui commandent au corps, tout en étant des parties de ce corps.

Au sein d'un État, émergeune autorité qui se distingue du fonctionnement social mais qui ne lui est pas pour autant extérieure.3.

Le paradigmedu corps social rend sensibles le fonctionnement et la structure d'un État républicain.

Au contraire, il sera pluséclairant de représenter un État despotique par une simple machine.

Kant suggère à ce propos, comme symbole, lemoulin à bras dont le procédé évoque la situation d'un État dirigé par « une volonté singulière absolue» (Critique dela faculté de juger, § 59).Le paradigme mécanique de la machine attire notre attention sur l'existence d'un ressortqui serait comme le lieu d'origine du mouvement, et à partir duquel il se communiquerait aux autres constituants.

Ledespote de la sorte se tient en dehors de l'État.

Il n'a plus rien de comparable avec le coeur qui prodigue la viedepuis le centre du corps social.Montesquieu ne cesse dans sa description du gouvernement despotique (De l'espritdes lois, livre III, chap.

10) de faire appel à des images physiques ou mécaniques.

La volonté du prince doit avoirson effet infailliblement, tous les intermédiaires sont niés.

Le despote se démultiplie et atteint pour ainsi diredirectement, les parties les plus éloignées.

Il n'y a pas de délibération, pas de dialogue, le temps se réduit au seulinstant de la décision qui se transmet d'une façon quasi mécanique, comme un mouvement qui se propageimmédiatement d'un élément à ses multiples extrémités.De même la crainte, qui est le principe du gouvernementdespotique (livre III, chap.

11), c'est-à-dire ce qui le fait agir, doit être pensée comme ce qui réduit la conscience àune nécessité mécanique.

La crainte est à la conscience ce que le choc est à la physique.Bref, un État despotiquene ressemble guère à un être vivant, mais plutôt à une machine bien construite, qui tire sa force motrice de lavolonté arbitraire d'un agent extérieur.Le fait est alors que l'on ne voit plus vraiment la ligne de partage entre uneexplication organique et mécanique.

Dans les deux cas, nous assistons à un effacement du politique comme tel.

Eneffet, si la société fonctionne comme un organisme, il n'y a pas besoin d'un pouvoir politique, puisque les individus,d'eux-mêmes, pris dans le tourbillon des échanges, se conforment au mouvement du tout.

Si à l'autre extrémité, iln'y a plus que des rapports mécaniques de puissance entre les hommes et le despote, la force proprement physiqueremplace le pouvoir politique.L'originalité du modèle organique doit donc être cherchée ailleurs que dans le point devue statique, dans le point de vue dynamique.

Et effectivement, nous savons tous qu'un organisme ne se forme pasde la même façon qu'une machine.

L'évolution n'est pas la fabrication.

A la question du fonctionnement de l'État oude la société, nous substituons donc celle de l'origine.2.

La genèse de la société1.

Puisqu'une société présente,comme nous l'avons dit, un ordre, nous sommes portés à croire que cet ordre résulte de la volonté des hommes.Nous pensons alors qu'une société est le produit d'une élaboration humaine.

On parlera d'elle, dans les termes d'uneconstruction rationnelle.

En ce cas, la société est une organisation.Mais il existe des structures d'ordre qui n'ont paspour origine l'intelligence.

Les organismes vivants constituent à cet égard le meilleur exemple d'émergence d'un ordrenaturel.

Nous sommes victimes d'un préjugé commun qui veut que nous ne voyons de l'ordre que là où il vise unobjectif particulier.

Ainsi la société nous semble obéir à une intention précise, à un plan spécifique.Or on peutmontrer au contraire que la société s'apparente beaucoup plus à un organisme, qu'elle est donc un ordre spontané,c'est-à-dire ni voulu ni même conçu.

La société s'organise d'elle-même sans que nul ne l'ait expressément décidé.Enévoquant ce processus d'auto-organisation, on peut se demander s'il est encore pertinent de voir dans la notiond'organisme une simple image.

L'ordre social n'est peut-être pas un ordre entièrement naturel, mais il n'est pas nonplus un ordre artificiel.

Il se situe pour ainsi dire entre les deux.

Il naît et se développe comme un organisme, maistout en même temps, touche à l'intelligence.

C'est donc qu'il y a une espèce de continuité entre l'évolution de la vieet la genèse de la société.

La vie se communiquerait ainsi de l'organisme le plus simple, à l'homme, jusqu'à sonachèvement, la société.

L'évolution sociale prolongerait en quelque sorte l'évolution de la vie.Au fond, il n'y a riend'étonnant à ce que la société soit comme le produit d'un ordre évolutif.

Les langues en sont un exemple frappant.. »

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