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Peut-on concevoir un société sans morale ?

Publié le 10/12/2005

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morale
Une société véritablement humaine permet la réalisation du bien vivre selon la raison, et ne peut pour cela se passer de morale               Nous avons vu qu'une société sans morale était concevable, au sens où le droit suffit à assurer la coexistence pacifique des membres de la société. Mais une telle société serait-elle véritablement humaine. Ne doit-on pas penser qu'une société humaine devrait permettre à ses membres plus que de ne pas se nuire les uns aux autres, mais devrait leur permettre de  se réaliser pleinement comme êtres humains ? Or Aristote considère que l'homme est par essence un animal rationnel. L'animalité désigne le genre auquel appartient l'homme, la rationalité sa différence spécifique (c'est-à-dire ce qui le distingue des autres animaux). Or pour se réaliser pleinement, l'homme doit exprimer ce qui le caractérise en propre, donc ne pas vivre seulement comme un animal, mais vivre de manière rationnelle. C'est la raison pour laquelle Aristote écrit dans les livre I, ch. 1 et 2 de La politique, que la cité a pour fin non pas seulement l'entretien de la vie mais le bien vivre, c'est-à-dire une vie conforme à l'excellence de l'homme (qui lui permette de réaliser son essence rationnelle). Si pour réaliser son essence rationnelle l'homme a besoin de la vie en société, c'est donc que l'homme est aussi par essence un animal politique. Mais en quoi la vie en société permet-elle la réalisation de la rationalité de l'homme ?

La société désigne un ensemble d’individus liés par des relations d’interdépendance. On peut parler dans ce sens de sociétés animales (les abeilles), mais ce qui distingue les sociétés humaines est que les relations d’interdépendance y sont réglées par des institutions conventionnelles (le droit, la justice). Contrairement aux sociétés animales, une société humaine ne peut donc pas fonctionner sans normes instituées. Mais la société humaine doit-elle nécessairement comporter en plus des règles légales des normes morales ? La morale comme le droit, se présente comme une théorie de l’action humaine, qui ne se contente pas de décrire l’action mais établit les normes qui permettent de déterminer ce qu’elle doit être. Mais alors que dans une perspective juridique une action est bonne à partir du moment où elle est conforme aux lois en vigueur, la morale considère également l’intention de l’agent. Ainsi l’action bonne selon la morale ne sera pas seulement celle qui respecte la loi, mais celle qui a été accompli par devoir. On peut penser que la société ne requiert pour son bon fonctionnement que le fait que soient respectées les lois en vigueur, sans que l’intention de l’agent doive être orientée sur le devoir. En effet lorsque les actions des hommes sont réglées par la législation, la liberté de chacun ne risque pas d’empiéter sur celles des autres, et la coexistence des individus, donc la vie en société, est possible. En ce sens une société sans morale serait concevable. Mais la société véritablement humaine requiert plus que la simple possibilité de la coexistence des individus, elle commence lorsque les hommes recherchent en commun un bien vivre qui permet l’épanouissement de leur dimension rationnelle. Dans cette perspective les intentions qui gouvernent leurs actions doivent être prise en compte. Donc une société véritablement humaine ne peut pas être concevable sans morale. Pourtant il faut souligner que la morale ne se réduit pas à un ensemble de valeurs supposées absolues et que l’homme devrait respecter passivement. La morale peut au contraire être conçue comme un ensemble de valeurs créées par l’homme.

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« III.

La morale qui fait de la société une société pleinement humaine n'est pas un donné absolu, mais enappelle au contraire à la créativité de ses membres.

Dire que la société pleinement humaine ne peut se passer de morale ne signifie pas pour autant que lasociété doive imposer à ses membres des notions uniques du bien et du mal.

En effet il n'est pas certain qu'il y aitun bien et un mal absolus.

Dans La généalogie de la morale , Nietzsche met en évidence deux types de morales, qu'il appelle la morale des maîtres et celle des esclaves.

Le maître est le type del'homme fort, qui est également celui qui peut créer des valeurs.

Pour lui êtrebon n'est pas se conformer à une idée préexistante du bien.

Ce qui est bon,c'est ce qu'il déclare être tel, parce que cela est bon pour lui .

Le faible, qui produit une morale d'esclave, ne fait que réagir au comportement du fort, eninversant les valeurs posées par le fort, également parce qu'il a intérêt àcontester ces valeurs.

Ainsi le fort dit que l'expression de la puissance estbonne, parce qu'elle le sert, tandis que le faible dit qu'elle est mauvaise,parce qu'elle lui nuit.

Rechercher l'origine d'un concept revient à comprendre les conditions danslesquelles il s'est formé, par qui et à quelles fins il a été créé.

Un conceptn'est pas quelque chose de neutre, puisqu'il cache une volonté que lagénéalogie va s'efforcer de démasquer.

Dans l'origine de la morale, Nietzscheva faire apparaître la stratégie des faibles pour se protéger contre les forts.Dans l'ascétisme, il va déceler l'orgueil de celui qui valorise la souffrance etdévalorise le monde.

La généalogie est une philosophie du soupçon quiinterroge les apparences pour les renverser.Le système, qui prétend parvenir de façon cohérente à une vérité unique,est, pour Nietzsche, l'indice d'une volonté qui a renoncé à penser librementpour se consacrer à la recherche d'une vérité stable.

Le système est unobstacle à la vie de la pensée.

Nietzsche critique notamment le système hégélien, qui pense toujours une chose enrelation dialectique avec son contraire (le maître avec l'esclave).

Être le maître sans être le maître de personne, etsurtout pas d'un esclave, tel est l'idéal de liberté que propose la philosophie de Nietzsche.

En réalisant cette généalogie de la morale Nietzsche n'entend supprimer toute morale, mais il refuse qu'il y ait unemorale absolue qui devrait en droit s'imposer à chacun.

Nietzsche considère que c'est à chacun de se créer sa tabledu bien et du mal, sans se laisser imposer de prétendues valeurs absolues de l'extérieur.

On comprend donc que siune société ne peut être pleinement humaine sans morale, cette morale ne doit pas être imposée à ses membres aumême titre que les lois juridiques.

Une société pleinement humaine doit imposer des lois juridiques à ses membres(pour assurer la coexistence pacifique des libertés) mais les laisser libre de forger leur propre morale.

Ce n'est doncni une société dépourvue de morale, ni ne société imposant une morale, mais une société permettant à chacun dese forger sa morale.

Conclusion Contrairement aux sociétés animales, les sociétés humaines ne peuvent exister sans normes instituées quirégulent les actions de ses membres.

Mais ces normes devant régler les rapports entre les individus, elles neconcernent que les actions des individus et non leurs intentions profondes.

Une société sans morale semble donc possible.

Mais cette société ne serait pas pleinement humaine, car elle ne permettrait pas à l'homme de réaliser sonessence.

Pour autant cela ne signifie pas qu'une société permettant à l'homme de réaliser son essence devraitimposer à ses membres une morale unique.

Cela signifie qu'une telle société doit 1) imposer des lois sur le planjuridique 2) permettre à chacun de se forger sa propre morale.. »

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