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Sommes-nous justes uniquement par contrainte ?

Publié le 21/01/2004

Extrait du document

Alors que ce dernier nous montre des hommes capables de vouloir le mal, quand ils peuvent l'accomplir sans dommage, Socrate soutient que « nul n'est méchant volontairement. » Cette phrase signifie que celui qui commet l'injustice croit que cela lui est plus avantageux, plus profitable, que de respecter la loi et que c'est donc son « bien » (son intérêt) de la commettre. Il ne sait pas que ce qu'il croit être ici son bien lui est nuisible, en réalité, à lui-même tout autant qu'à celui contre qui il a commis une injustice.S'il avait connaissance du vrai bien, il le désirerait car il comprendrait qu'il vaut pour lui-même et ne chercherait pas ainsi à enfreindre les lois. Aussi « nul n'est méchant volontairement » mais par ignorance du vrai bien confondu avec un faux bien personnel.Il faut donc maintenant démontrer que l'injustice est plus nuisible que la justice. Tout l'effort de Socrate, à la suite de cet extrait, va tendre vers ce but, c'est-à-dire tenter de prouver que, même lorsqu'on croit que le criminel impuni est avantagé par son acte, ce dernier est tout autant lésé que sa victime.Pour comprendre la portée de cette position il faut alors définir ce que Platon entend par le vrai Bien et quelle est sa conception de la justice, ce qui est l'objet même de La République. Pour Platon, en effet, la justice chez l'individu se définit comme le respect d'un ordre entre les trois parties de notre âme : la raison, tournée vers la connaissance, le courage et ses énergies parfois coléreuses, les passions, enfin, et leurs désirs.La raison doit commander à ces deux autres domaines et c'est ce qui définit une âme saine et sage.

« ordre de subordination est perverti (lorsque les passions par exemple commandent aux autres parties), l'anarchie quis'empare de l'âme entraîne sa véritable maladie, que nous appelons « vice », car elle devient sujette aux désirs sansfrein, à la démesure et aux excès.

L'âme ainsi pervertie souffre de ce désordre quand elle se laisse tenter par lecrime et qu'elle désobéit aux lois qui incarnent, au niveau de la Cité, la raison humaine.La réponse de Socrate à Glaucon ne porte donc pas sur le résultat immédiat que procure un acte injuste et quipeut, à courte vue, sembler un bénéfice plus avantageux que le respect du Bien, mais sur le principe qui l'a rendupossible, à savoir un dérèglement des parties de l'âme.

Dérèglement que ne connaît pas l'homme juste qui a suconserver en lui les rapports de domination et de sujétion conformes à la vie saine de son âme.

¦ L'origine de la justice est une convention. Dans ce passage de La République, Glaucon, ami de Socrate prend la parole pour tenter de définir la justice.

ContreThrasymaque qui vient de soutenir que la justice est naturelle et se confond avec la loi du plus fort, Glaucon pense,au contraire, que la justice résulte d'une convention. « Glaucon : - Ecoute ce que je me suis chargé d'exposer d'abord, c'est-à-dire quelle est la nature et l'origine de lajustice.On dit que, suivant la nature, commettre l'injustice est un bien, la subir un mal, mais qu'il y a plus de mal à la subirque de bien à la commettre.

Aussi quand les hommes se font et subissent mutuellement des injustices et qu'ils enressentent le plaisir ou le dommage, ceux qui ne peuvent éviter l'un et obtenir l'autre, jugent qu'il est utile des'entendre les uns les autres pour ne plus commettre ni subir l'injustice.

De là prirent naissance les lois et lesconventions des hommes entre eux, et les prescriptions de la loi furent appelées légalité et justice.

Telle est l'origineet l'essence de la justice.

Elle tient le milieu entre le plus grand bien, c'est-à-dire l'impunité dans l'injustice, et leplus grand mal, c'est-à-dire l'impuissance à se venger de l'injustice.

Placée entre ces deux extrêmes, la justice n'estpas aimée comme un bien, mais honorée à cause de l'impuissance où l'on est de commettre l'injustice.

Car celui quipeut la commettre et qui est véritablement homme se garderait bien de faire une convention aux fins de supprimerl'injustice ou commise ou subie : ce serait folie de sa part.

Voilà donc, Socrate, quelle est la nature de la justice, etl'origine qu'on lui donne.

» Platon, La République, livre 2, 358d/359b.

Traduction Chambry. Vaut-il mieux subir l'injustice que la commettre ? Pour Socrate, la justice est une valeur absolue.

Elle est pour lui lebien et la vertu par excellence.

Glaucon propose ici de définir la justice non comme une fin, mais comme un moyen.Elle n'a donc qu'une valeur relative.

Il oppose la nature et la loi.

Par nature, l'injustice est préférable.

Par la loi, lajustice est préférable.

Ce changement s'explique par le fait que les hommes ont fait un calcul.

Avant l'établissementde toute loi, le risque de subir l'injustice étant supérieur à l'occasion de pouvoir la commettre dans la majorité descas, les hommes s'entendent entre eux et établissent une convention par laquelle ils se protègent de l'injusticesubie et renoncent à l'injustice commise.La justice n'est donc pas naturelle.

Elle résulte d'une institution, d'un contrat.

C'est sur la loi qu'il faut s'appuyerpour la faire exister, et non sur la nature.. »

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