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Voir le meilleur, est-ce nécessairement le suivre ?

Publié le 09/01/2004

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Le sujet ne porte pas sur ce qu'est le « meilleur « : la question « qu'est-ce que le meilleur? « ne doit pas être traitée pour elle-même. Le sujet porte sur l'articulation entre « voir le meilleur « et « suivre le meilleur « ou, en d'autres termes, entre la connaissance et l'action. La question nous invite à nous demander si l'action est le simple aboutissement de la connaissance, ou s'il y a plus dans l'action que dans la connaissance. Le démarche du devoir découle de là : le sujet propose pour point de départ l'affirmation qu'il suffit de voir le meilleur pour le suivre. Cela revient à dire que l'action n'est que l'aboutissement de la connaissance. Cette proposition, qui n'est pas évidente, doit être justifiée, et tout le devoir va être orienté par cette unique question : qu'est-ce qui peut fonder cette dépendance de l'action à l'égard de la connaissance ? Dans cette recherche du fondement, la réflexion rencontre des cas où apparemment, il ne suffit pas de voir le meilleur pour le suivre. En cherchant à concilier ces cas avec la proposition de départ, on va s'avancer vers un fondement plus profond de la dépendance entre connaissance et action. On peut chercher ces exemples dans plusieurs directions : — les passions qui font échec au gouvernement de soi par la raison ; — l'inconscient qui échappe à l'emprise de la conscience ; — le mal moral : le mal suppose que l'on connaisse le bien — un homme qui ne connaît pas le bien ne peut être tenu pour responsable du mal qu'il fait — et que tout en le connaissant, on ne le pratique pas. Notre corrigé a choisi de suivre cette troisième direction.

« que nous voulons.

Etre injuste est faire son malheur en croyant se faire plaisir.L'antagonisme entre le point de vue habituel et la position de Socrate est magnifiquement exposé par le débat entreCalliclès et Socrate, dans le « Gorgias ».

Calliclès prétend : « Voici, si l'on veut vivre comme il faut, on doit laisseraller ses propres passions, si grandes soient-elles, et ne pas les réprimer .

» Socrate pense, lui, que l'accès aubonheur, au Bien, « cela veut dire être raisonnable, se dominer, commander aux plaisirs et aux passions qui résidenten soi-même ».Pour tenter de réfuter Calliclès, Socrate lui montrera que son idéal de mode de vie ressemble bien à une « passoire».

L'intempérance consiste à accumuler des plaisirs qui n'ont aucune consistance, à ne pas savoir se mesurer, sesatisfaire, mais au contraire à être habité par des désirs tels que pour les combler il faut « s'infliger les plus durespeines ».

L'erreur fondamentale de Calliclès est de confondre l'agréable et le bon, de confondre la démesure desdésirs déréglés et irrationnels avec l'équilibre de la satisfaction véritable.C'est que l'injustice est une maladie de l'âme, et plus précisément encore la subversion d'un ordre.

Le magnifiquemythe de l'attelage ailé dans le « Phèdre » décrit d'une façon imagée ce qu'est l'âme.

Elle est comparée à unattelage composé d'un cocher et de deux chevaux.

L'un est blanc, docile, l'autre est noir, à les oreilles poilues et semontre sourd aux injonctions du cocher ; il menace ainsi l'équilibre de l'attelage.

Il y a donnc trois instance dansl'âme.

Le cocher figure la raison, qui a pour tâche de diriger.

Le « cheval blanc » représente le siège de l'honneur, dela colère.

Le « cheval noir » symbolise l'âme concupiscible, siège des désirs, et plus précisément des désirs liés aucorps.

Or ces désirs ont pour caractéristiques d'être multiples, tyranniques, de ne rien respecter (Platon anticipedans certaines descriptions sur tous les cas cliniques décrits par Freud).Or, la justice consiste d'abord dans le respect de la hiérarchie naturelle des trois instances, qui doivent s'ordonnersous la conduite de la raison.

Se dominer, être maître de soi, tenir en bride le « cheval noir », c'est faire régnerl'ordre.

L'injustice consiste au contraire dans la subversion de cet ordre, dans la prédominance que l'on accorde àl'âme concupiscible.

C'est une maladie, une perversion, qui remet en cause la totalité de l'individu.

Dans cettetyrannie du supérieur par l'inférieur, l'homme devient esclave des désirs sans frein ; c'est pourquoi il estnécessairement malheureux.

Il devient incapable de jugement, d'honneur, et, au lieu d'être maître de soi, il estsoumis à ce qu'il y a de plus bestial en lui.Céder aux passions, au désir, rêver d'être tyran est donc en fait rêver d'être impuissant, confondre ce qui estagréable avec ce qui est bon.

Nul ne peut être véritablement maître des autres sans être d'abord maître de soi.

Leprojet d'hommes comme Calliclès est contradictoire : on ne peut à la fois être soumis à ses propres désirs et libre,être maître et serviteur.Le « Grogias » filait la métaphore des deux tonneaux.

L'homme maître de lui-même, ordonné, est celui qui saitcombler ses désirs sans leur céder, accorder au corps ce qu'il faut.

L'homme tyrannique poursuit sans trêve desplaisirs nouveaux, comme on verse du liquide dans un tonneau ; mais ce que ne sait pas cet être de la démesure, cequ'il ne veut pas voir, c'est que sa conduite déréglée en fait un « tonneau percé ».

Il peut sans fin accumuler lesplaisirs : il ne sera jamais comblé, et s'épuisera en pure perte.Le dérèglement est donc d'abord une faute de jugement : c'est une incompréhension de ce qu'est le bien véritable,une confusion entre bon & agréable.

Ainsi, il est clair que « Nul n'est méchant volontairement ».

Éclairer lesintelligences, c'est ipso facto redresser les conduites.Mais puisque l'injustice est une maladie de l'âme, une perversion de l'ordre, alors la punition est le remède approprié.Le châtiment est conçu par Platon comme analogue du médicament.

On accepte la souffrance physique pour sesoigner, pour réparer un mal, parce qu'on sait que le traitement enduré est finalement bénéfique.

Il doit en aller demême pour l'âme : la souffrance endurée, là encore, doit être comprise comme nécessaire au rétablissement d'unéquilibre que l'injustice avait compromis.

C'est pourquoi, aussi paradoxale que paraisse la thèse, « il est pire de nepas être puni que de l'être ».

L'homme injuste impuni est semblable au malade abandonné à son sort.Platon inaugure la grande tradition de l'ascétisme.

En un sens, toute notre morale est restée imprégnée des thèsesplatoniciennes, et il n'y a guère que Nietzsche pour avoir reconnu en Calliclès un modèle. B) Résultant d'une erreur sur le monde, la méchanceté est impuissance de l'action. 1) Le mal trouve son origine dans une impuissance à apprécier correctement la situation. 2) L'injustice est à son tour une impuissance à agir de façon équitable : l'injustice absolue serait l'impuissanceabsolue. C) On guérit le méchant en éclairant son intelligence. 1) Redresser les opinions fausses est donc la seule réponse adéquate au règne de l'injustice. 2) Mais les opinions fausses ne naissent pas au hasard mais sont le signe que les passions dominent l'âme humaine. 3) L'appel à la raison pour redresser les opinions fausses serait vain sans l'appel au thumos pour imposer à l'âme toutentière le règne des vues de la raison.• De même que, dans la Cité, il ne suffit pas qu'il y ait des philosophes pour voir le meilleur, encore faut-il qu'ilssoient au pouvoir pour orienter toute la Cité vers le Bien.

(Platon) II) La volonté n'est-elle pas fascinée par le mal ? A/ Il y a en l'homme un désir du mal qui ne se réduit pas à une ignorance du bien.. »

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