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Article de presse: Serguei Korolev : anonyme jusqu'à la mort

Publié le 22/02/2012

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4 octobre 1957 - Qui fut-il de son vivant ? Rien, pourrait-on dire, sinon, pour la façade, le légendaire " constructeur principal des fusées et des vaisseaux spatiaux soviétiques ", le héros sans nom de l'astronautique soviétique, dont Nikita Khrouchtchev agitait périodiquement le spectre à chaque première spatiale soviétique. Un sort bien fade pour celui que l'on considère un peu comme le von Braun soviétique : Serguei Pavlovitch Korolev. De longues années durant, son identité fut soigneusement dissimulée sous prétexte que le fait de porter sa brillante carrière à la connaissance du public aurait pu donner des indications précieuses sur les voies suivies par l'URSS dans le domaine des lanceurs militaires. Triste ironie du sort, il faut attendre sa mort, le 14 janvier 1966, pour corriger cette injustice. L'homme, malade depuis déjà quelque temps, a succombé officiellement à une défaillance cardiaque. Il était âgé de soixante ans. L'Union soviétique lui rend alors l'hommage qu'il convient, comme en témoigne sa notice nécrologique signée-fait remarquable à l'époque-par les principaux membres du régime et la plupart des grandes personnalités scientifiques. Difficile de faire moins pour ce fils d'instituteur, né le 30 décembre 1906 à Jitomir (Ukraine), à qui l'URSS doit les fusées qui lui ont permis de réaliser nombre de premières spatiales : mise en orbite du premier satellite artificiel autour de la Terre; premier vol habité dans l'espace (1961); première sortie dans l'espace avec Alexei Leonov (1965). Dès 1931, Serguei Korolev, ancien élève de l'Ecole professionnelle du bâtiment d'Odessa, mais aussi de l'Institut technique supérieur de Moscou et de l'Ecole des pilotes de Moscou, s'est consacré à l'aéronautique. Très vite, il s'intéresse à la réalisation d'appareils volants propulsés par des moteurs fusées. Il rencontre alors un spécialiste des moteurs à réaction, Friedrich Tsander, avec lequel il participe à l'organisation du Groupe pour l'étude de la propulsion par réaction-le fameux GIRD,-dont il deviendra vite le directeur. C'est dans cet organisme que sera conçue et réalisée, en août 1933, la première fusée soviétique à propulsion liquide, connue sous le nom de GIRD-09. A la fin de 1933, le GIRD et le Laboratoire de dynamique des gaz (GDL) fusionnent et donnent naissance à l'Institut de recherches scientifiques sur la propulsion par réaction (RNII), dont Korolev sera, à partir de 1934, directeur de la section des engins volants du type fusée. Sa voie est désormais tracée, comme en témoignent la réalisation de plusieurs engins de ce type et celle de fusées d'appoint utilisées pendant la guerre, notamment pour aider au décollage de certains appareils de l'armée de l'air soviétique. Après la guerre, il reprend ses recherches sur les fusées et est chargé du développement des versions améliorées du V-2 allemand. De ces études naîtront successivement la T-1, version soviétique du V-2, la T-2, dont la mise en production a commencé dès 1952, et la T-3, missile à vocation intercontinentale. Si les autorités soviétiques font alors preuve d'une grande discrétion sur la nature réelle des activités de Korolev, il est clair cependant qu'il est à l'origine de la " panoplie " de fusées construites pendant les années 50 et 60, et que, une dizaine d'années durant, il a, sous l'autorité d'un comité d'Etat alors présidé par Leonid Brejnev, dirigé l'ensemble du programme spatial soviétique. La suite, on la connaît. C'est la fameuse fusée Zemiorka, un engin de 300 tonnes que l'on a coutume d'appeler la " fusée de Korolev ". Une fusée remarquable, parce qu'elle est à l'origine des premiers succès spatiaux soviétiques, mais surtout parce qu'elle a été vraisemblablement lancée, et avec quel taux de réussite, plus de sept cents fois ! JEAN-FRANCOIS AUGEREAU Janvier 1985

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