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Nous avons beau nous émerveiller chaque fois de pouvoir nous laisser prendre par la fiction, cette médaille a son revers, du point de vue même du roman. Il n'est pas de lecteur qui ne se sente confusément que celui-ci est bien d'autres choses que sa fiction, qu'il tient pour nous en réserve bien d'autres expériences non moins étonnantes qu'elle nous dérobe parce que sa loi naturelle est de tendre à occulter tout ce qui n'est pas elle. N'en va-t-il pas ainsi du langage auquel pourtant l

Publié le 21/11/2011

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langage

Le vingtième siècle est d'une importance crusciale dans l'histoire de la littérature. En effet, le roman est jusqu'alors perçu comme un élément primordial, destiné à poser sur le papier une réalité, à raconter une histoire composée de personnages. Le début du siècle pose d'autres problématiques. Le roman se veut plus compliqué, plus intense, les auteurs cherchent à le rendre moins "lisse", plus transparent. En effet, Henri Godard pose le problème dans Le roman, mode d'emploi. Il écrit ainsi,  "Nous avons beau nous émerveiller chaque fois de pouvoir nous laisser prendre par la fiction, cette médaille a son revers, du point de vue même du roman. Il n'est pas de lecteur qui ne se sente confusément que celui-ci est bien d'autres choses que sa fiction, qu'il tient pour nous en réserve bien d'autres expériences non moins étonnantes qu'elle nous dérobe parce que sa loi naturelle est de tendre à occulter tout ce qui n'est pas elle. 

langage

« Il est vrai que le fait de dire que le roman représente la réalité à depuis tous temps susciter de nombreux débats.

Ainsi, peut -on vraiment dire qu'une oeuvre romanesque, qui a donc pour unique but le divertissement puisse aussi avoir pour vocation de décrire une réalit é pure et dure.

Godard emploi le terme "confusément" à juste titre pour décrire ce phénomène car Rousseau l'employait déjà dans ses Confessions: il a ressenti des "sentiments confus" en apprenant à lire dans les romans de sa mère.

Il écrit: "les lectures d e ma mère me donnèrent de la vie humaine des notions bizarres et romanesques, dont l'expérience et la réflexion n'ont jamais bien pu me guérir." On peut, en ce sens, évoquer le parfait exemple de la déperdition que peut susciter la lecture d'une oeuvre rom anesque en citant Emma dans Mafame Bovary de Gustave Flaubert qui ne voit en la réalité que le reflet de ses lectures passées.

Elle dit par exemple: "...comme si la plénitude de l'âme ne débordait pas quelquefois par les métaphores les plus vides, puisque personne, jamais, ne peut donner l'exacte mesure de ses besoins, ni de ses conceptions, ni de ses douleurs, et que la parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles.

" Cette citation est idéale pour rejoindre les propos de Godard puisqu'elle suit l'idée que les mots ne peuvent retranscrire les choses de l'âme, la réalité est comme déviée par les métaphores.

Marthe Robert, dans Roman des origines et origines du roman, e n 1972, est totalement dans cette optique d'un refus du roman comme représentation d'une réalité.

Elle écrit en effet: "Il y a donc deux types de romans, l'un qui prétend prélever sa matière sur le vif pour devenir une tranche de vie ou le fameux "miroir q u'on promène sur un chemin"; l'autre qui, avouant de prime abord n'être qu'un jeu de formes et de figures, se tient quitte de toute obligation qui ne découle pas immédiatement de son projet".

Les deux dans ce cas sont trompeurs puisque le premier découle d 'une volonté du lecteur de retrouver dans le texte une illusion de sa réalité et dans le second cas, le lecteur, malgré le fait qu'il sait de prime abord qu'il est face à une fiction, se laisse porté par le texte et par le langage qui lui est cher.

Ainsi, quoi qu'il arrive le lecteur est perdu dans sa lecture, même s'il sait que c'est une oeuvre romanesque.

Néanmoins, cette lecture, même faussée, permet à l'être humain de se retrouver dedans et de refaire sa vie en fonction de ses envies les plus réprimées, comme c'est le cas pour Emma, qui rêve une histoire d'amour passionnelle et qui ne la trouvera pas à la hautre de ses besoins les plus profonds.

Phillipe Forest écrit: "Le roman répond à l’appel du réel – tel que cet appel s’adresse à chacun dans l’expér ience de l’ « impossible », dans le déchirement du désir et celui du deuil (...).

Quelque chose arrive alors qui demande à être dit et ne peut l’être que dans la langue du roman car cette langue seule reste fidèle au vertige qui s’ouvre ainsi dans le tissu du sens, dans le réseau des apparences afin d’y laisser apercevoir le scintillement d’une révélation pour rien (...).

Tel est le réalisme du roman qui procède de l’existence afin d’en produire une représentation qui rende compte de l’expérience vécue (...

) et dont se déduit une vérité, le labeur de l’écrivain consistant à la reprendre sans fin, à s’en revenir sans cesse vers elle (...)" En disant cela, il se place en fidèle successeur de Lacan ("Le réel, c'est l'impossible.") et de Bataille ("L'impossible, c'est la littérature.") Ainsi le lecteur et même l'auteur par extension est confronté à la réalité au travers de l'écriture: il y est constamment confronté.

L'intérêt d'un roman ne serait donc plus d'écrire le réel mais de bien écrire le réel.

D'user de tous les artifices possibles afin de faire en sorte que ni l'auteur ni le lecteur ne soit dupe et puisse profiter de son texte.. »

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