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[Condition naturelle et bonheur] ROUSSEAU

Publié le 27/02/2008

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rousseau
«C'est l'imagination qui étend pour nous la mesure des possibles, soit en bien, soit en mal, et qui, par conséquent, excite et nourrit les désirs par l'espoir de les satisfaire. Mais l'objet qui paraissait d'abord sous la main fuit plus vite qu'on ne peut le poursuivre ; quand on croit l'atteindre, il se transforme et se montre loin devant nous. Ne voyant plus le pays déjà parcouru, nous le comptons pour rien ; celui qui reste à parcourir s'agrandit, s'étend sans cesse. Ainsi l'on s'épuise sans arriver au terme; et plus nous gagnons sur la jouissance, plus le bonheur s'éloigne de nous. Au contraire, plus l'homme est resté près de sa condition naturelle, plus la différence de ses facultés à ses désirs est petite, et moins par conséquent il est éloigné d'être heureux. Il n'est jamais moins misérable que quand il paraît dépourvu de tout ; car la misère ne consiste pas dans la privation des choses, mais dans le besoin qui s'en fait sentir. Le monde réel a ses bornes, le monde imaginaire est infini ; ne pouvant élargir l'un, rétrécissons l'autre ; car c'est de leur seule différence que naissent toutes les peines qui nous rendent vrai¬ment malheureux.» J.-J. Rousseau
rousseau

« un manque et une faiblesse.

Il faut penser ici à un auteur comme Schopenhauer pour qui le désir n'est quesouffrance.

Questions 1.

Dégagez l'idée centrale du texte et les étapes de son argumentation.2.

Expliquez :«C'est l'imagination qui étend pour nous la mesure des possibles»;« Plus nous gagnons sur la jouissance, plus le bonheur s'éloigne de nous ».3.

Le monde imaginaire n'a-t-il pas, lui aussi, des bornes ? Question 1 Rousseau procède d'abord à une analyse de l'imagination dans son rapport au désir1) Un premier constat : l'imagination «étend pour nous la mesure des possibles».2) Une première conséquence: l'imagination étend du même couple nombre de nos désirs (nous voulons jouirdeces «possibles» dans la mesure où nous nous les représentons comme des choses bonnes et agréables).3) Un second constat : le désir est par essence un mouvement vers, une aspiration à ce que l'on a pas(puisqu'on ne peut désirer ce que l'on a tant qu'on l'a) ; aussi à peine satisfait le désir tend-il de nouveau etde lui-même vers un nouvel objet.

Car le désir en fait ne désire pas dans son fond quelque chose de déterminé,mais «cela qui n'est pas», «l'être-à-venir», «l'autre», sorte d'être-absent ou de non-être qui, tel Protée, prendtoutes les formes pour les abandonner aussitôt («L'objet qui paraissait d'abord sous la main fuit plus vite qu'onne peut le poursuivre ; quand on croit l'atteindre, il se transforme et se montre au loin devant nous»).4) Une seconde conséquence: le développement du désir, notamment par l'imagination, est une entrave aubonheur, puisque, ne pouvant jamais se satisfaire de ses satisfactions, le désir est toujours malheureux.

(«plusnous gagnons sur la jouissance, plus le bonheur s'éloigne de nous.).Rousseau procède en un second temps à une analyse de la «condition naturelle» de l'homme, qu'il oppose àl'imagination dans la mesure où cette dernière y a peu de place1) Un constat: dans la condition naturelle de l'homme «la différence de ses facultés à ses désirs est petite»,c'est-à-dire que ses désirs correspondent à ses facultés naturelles, en d'autre termes que ses désirs nedépassent pas ses besoins (manger, boire, dormir, se reposer, se reproduire, etc.).2) Une conséquence: Ses désirs, dans cette condition naturelle, étant limités et pouvant du même coup êtrefacilement satisfaits, l'homme goûte alors un état proche du bonheur.Rousseau tire alors une conclusion généraleC'est en se rapprochant de notre condition naturelle, qui ne connaît que des besoins, c'est-à-dire en«rétrécissant» notre monde imaginaire qui suscite des désirs infinis, que nous nous rapprocherons du bonheur. Question 2Expliquez : « C'est l'imagination qui étend pour nous la mesure des possibles.

» Imaginer, c'est non seulement se représenter ce qui est en tant qu'il ne nous est pas immédiatement donné(par exemple, j'imagine mon frère dans la pièce où je travaille), mais encore inventer des choses qui n'ontjamais existé mais qui pourraient éventuellement exister (j'imagine une machine à remonter le temps) : par làl'imagination «étend la mesure des possibles». «Plus nous gagnons sur la jouissance, plus le bonheur s'éloigne de nous.»Plus nous cherchons à satisfaire nos désirs, moins nous sommes heureux car cette quête est sans fin. Question 3Le monde imaginaire n'a-t-il pas, lui aussi, des bornes ? On pourra orienter sa réflexion en se demandant si l'imagination est vraiment créatrice.

Ses «créations» nesont jamais des créations absolues, mais des re-créations, des constructions nouvelles, des combinaisonsoriginales d'éléments préexistants du monde réel.

Nous imaginons toujours ce qui n'est pas et qui pourrait êtreà partir du monde qui nous est donné.

Il nous est impossible d'imaginer quelque chose de radicalement, detotalement nouveau : nous ne pouvons imaginer ni penser l'absolument autre.

En ce sens l'imagination a desbornes.. »

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