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Dans les Méditations métaphysiques Descartes écrit : je pense donc je suis. De son côté Rousseau écrit dans Les Rêveries du Promeneur solitaire: je sens donc je suis. En vous appuyant sur chacune de ces affirmation, vous vous demanderez quel sens il faut donner à la conscience d'exister.

Publié le 27/02/2008

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descartes

Les positions de Descartes et de Rousseau semblent marquer deux axes d’affirmation opposées dans la découverte de la conscience de soi : pour l’un, c’est par la substance pensante que se dévoile l’indubitable conscience d’exister ; pour l’autre, c’est le recours à l’intuition qui définit cette possibilité.

Pourtant, tous deux se rejoignent sur l’affirmation d’une première personne du pluriel qui existe dans l’affirmation d’un seul acte (penser, sentir) et non dans la rencontre avec d’autres éléments. Mais quel sens peut-on donner à cette découverte qui n’affronte pas l’altérité ?  Quels sont les liens qui peuvent se tisser entre conscience et connaissance ?

Les enjeux de telles interrogations relèvent de la métaphysique que de l’éthique (de la pensée de la liberté sera déduite les possibilités de connaissance et d’action).

 

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« La conscience de soi ne peut donc être définie par un simple rapport à soi : ilfaut la réinscrire dans la perspective de l'être au monde.

Rousseau, lorsqu'ilénonce son « je sens donc je suis » dans les Rêveries se place dans la perspective d'une connaissance intuitive, première, qui ne nécessite pasmême l'usage de la raison pour être fondée.

Car lorsqu'on se penche sur lesécrits politiques de Rousseau, plus précisément sur la description de l'état denature, il est manifeste que la raison est une faculté qui intervienttardivement dans l'histoire.

Dans les premiers temps, l'homme n'écoutait queson cœur et la nature, non pas de vils et calculateurs raisonnements. ð La conscience d'exister est délivrée de façon première dans l'écoute attentivede son cœur et de ses sentiments, non dans une recherche calculatrice de laraison.

Elle est voix de la Nature.Pourtant, il apparaît difficile de maintenir cette position de conscience de soicomme expression de la voix de la Nature : car lorsque Rousseau, dans lesRêveries vit ces intervalles de bonheur au sein de la Nature, c'est encore le langage, invention « culturelle » qu'il utilise pour les transcrire.

La consciencede soi s'avère donc se cristalliser dans le détournement de dispositifs naturelspar la culture, comme le souligne Merleau-Ponty dans la Phénoménologie de la Perception : « Tout est fabriqué et tout est naturel chez l'homme, comme on voudra dire, en ce sens qu'il n'est pas un mot, pas une conduite qui ne doivequelque chose à l'être simplement biologique - et qui en même temps ne sedérobe à la simplicité de la vie animale, ne détourne de leur sens les conduites vitales, par une sorte d'échappement et par un génie de l'équivoque qui pourraient servir à définirl'homme.

» ð Ainsi la conscience de soi se définit-elle dans l'usage des éléments naturels par l'intermédiaire d'une dispositifculturel : l'identité ne peut se penser dans l'une ou l'autre alternative (sensation ou raison) mais bien dans larencontre des deux : dès lors, la conscience de soi ne peut se définir de manière unilatérale et il nous fautrevenir sur les formulations univoques « je pense donc je suis » ou « je sens donc je suis ». Illusions du cogito Quel « je » ? : le cogito cartésien, comme la formule de Rousseau, semblent considérer la première personne du singulier comme un tout dont il serait possible d'avoir conscience et connaissance parfaites.

Pourtant, lorsque je dis« je », je n'ai pas accès au « je » en soi, mais aux manifestations de cette personne : ses actions, désirs, volontés.Ainsi Spinoza critique-t-il le cogito cartésien en soulignant la méconnaissance des déterminismes en place dans laNature : en pensant se connaître, l'homme se pense libre, il n'obéit en fait qu'à une illusion. ð La conscience de soi, ce n'est pas posséder une perception claire et évidente de soi, mais prendreconscience de la nécessité du Tout qu'est la Nature, des déterminismes qui agissent sur nous : seul le Sagey parvient.

De plus, en réduisant l'identité à la substance pensante, et non à l'union des deux substancesque sont âme et corps, Descartes mutile « la connexion des choses ». Le « je » comme « fait de grammaire » : dans Par delà le Bien et le Mal , Nietzsche note que le cogito cartésien fait référence à une identification entre le « je » et le « quelques chose pense en moi » : en d'autres termes, cetteéquivalence vaut dans la mesure où nous sommes habitués à utiliser un prédicat (ici « je ») à tout action(« pense »), mais on ne peut dire qu'il y a certitude immédiate : tout au plus allégation. ð Le sens de la critique nietzschéenne repose sur la dénonciation de la grammaire en tant que dans « je pensedonc je suis » sont présupposées une équivalence entre chose et activité.

Il nous faut donc revenir sur lapensée selon laquelle les mots sont déjà détenteurs de certaines vérités.

En particulier, le « je » ne reflètepas le langage souterrain du Soi, et tronque ainsi, à la faveur d'une identité fixe, toute la complexité duprocessus de déploiement de l'être.

Au terme de cette analyse, si le cogito cartésien fait de la conscience d'exister la condition sine qua non de toute recherche de la vérité ultérieure, elle est plongée dans un solipsisme dont on ne peut sortir qu'en réintégrant lanécessité de la négativité dans le processus de conscience, puis de connaissance de soi : le « je pense donc jesuis » rencontre d'autres consciences singulières, d'autres substances pensantes qui lui permettent de se déployer.De même, la déclaration de Rousseau plonge l'auteur de la solitude de la communion avec la Nature, se coupantainsi de la rencontre avec ses semblables : or, limiter la conscience d'exister à l'expression de la voie naturelle, celarevient à nier la particularité de l'homme qui repose sur la juxtaposition de dispositifs culturels et naturels.Ainsi nous a-t-il fallu revenir sur l'énoncé du cogito lui-même : il ne suffit pas de dire « je » pour exister.

Celui-citend à nous leurrer dans la mesure où cette énonciation nie les forces en présence, que ce soit celle de la Natureou du corps.

La conscience d'exister ne peut ainsi se dévoiler entièrement que dans la lucidité d'un processustoujours en mouvement.. »

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