LE PROBLÈME DE L'ESTHÉTIQUE INDUSTRIELLE: TEXTES ET PROBLEMATIQUES

« Il ne faudrait pas croire que ces valeurs esthetiques positives et carac- teristiques se soient epanouies gratuitement.

El les ne resultent pas de la simple force des choses; elles ne sont pas r« epiphenomene »3 d'une activite totalement et fondamentalement orientee vers d'autres buts.

El les compor- tent une veritable prise en charge de ces valeurs par le createur industriel. En un mot, et si paradoxal que cela puisse paraitre d'abord, ce n'est pas settlement en tant qu'hommes de science et d'industrie, c'est en tant qu'artistes exereant, meme sans s'en rendre nettement compte, au sein du travail de creation industrielle une aetivite partiellement mail fondamentale- ment artistique, que les fauteurs de ce« style actuel des choses» Pont procure an monde moderne. Expliquons-nous : Pour bien comprendre ce point, it faut, croyons-nous, faire appel a une notion que nous avons nous-meme proposee naguere, en opposant a l'idee ancienne d'art applique (sous-entendu, a l'industrie) celle bien differente d'art implique.

(...) Il est evident, par exemple, que les qualites esthetiques, positives, indeniables et parfois ties remarquables, d'une automobile, d'un avion, d'un ecouteur telephonique, d'un barrage pour station hydro-electrique, ne sauraient en rien (dans l'esprit moderne) resulter d'ornements surajoutes, ni d'une intervention de l'artiste professionnel se substituant a l'ingenieur pour en corriger ou pour en remanier l'ouvrage, pour le « surdeterminer4 ». Elles sont inherentes a ces choses memes, directement, en tant qu'elles sont reussies » ou « accomplies » ou « parfaites en leur genre »; en tant que leur forme est excellente, bien adaptee a la fonction.

(...) En les creant, l'ingenieur a fait a la fois et par un meme acte, par une meme demarche, ceuvre d'indus- trie et oeuvre d'art. Etienne SOURIAU, Passé, present, avenir du probleme de l'esthetique industrielle, Revue d'Esthetique, IV, Presses Universitaires de France, Paris, 1951, 1.

(sing.

leitmotif) : theme musical par extension, idee directrice.

- 2.

Art de gouverner les machines a auto-regulation et science de ces machines; le terme est employe ici pour designer l'homme en taut que machine a penser et a se gouverner.

- 3.

Ici, phenomene accessoire et surajoute; l'epiphenomenisme est une theorie qui fait de la conscience le reflet inefficace des processus organiques.

- 4.

Ajouter des significations supplementaires. SUJETS DE REFLEXION 1/ Quels sont les caracteres du « style moderne ne du progres industriel »? 2/ Expliquer : « musique plastique ». 3/ Expliquer la phrase : « et tous les details relatifs a la cybernetique (...) qui en couvrent les murs ». 4/ Comment comprenez-vous la notion « d'art implique»? 5/ Etes-vous d'accord avec SOURIAU qui affirme que l'ingenieur doit faire a a la fois et par un meme acte, par une meme demarche, oeuvre d'industrie et oeuvre d'art »? Il ne faudrait pas croire que ces valeurs esthétiques positives et carac­ téristiques se soient épanouies gratuitement.

Elles ne résultent pas de la simple force des choses; elles ne sont pas l'« épiphénomène »3 d'une activité totalement et fondamentalement orientée vers d'autres buts.

Elles compor­ tent une véritable prise en charge de ces valeurs par le créateur industriel.

En un mot, et si paradoxal que cela puisse paraître d'abord, ce n'est pas seulement en tant qu'hommes de science et d'industrie, c'est en tant qu'artistes exerçant, même sans s'en rendre nettement compte, au sein du travail de création industrielle une activité partiellement mais fondamentale­ ment artistique, que les fauteurs de ce« style actuel des choses» l'ont procuré au monde moderne.

Expliquons-nous : Pour bien comprendre ce point, il faut, croyons-nous, faire appel à une notion que nous avons nous-même proposée naguère, en opposant à l'idée ancienne d'art appliqué (sous-entendu, à l'industrie) celle bien différente d'art impliqué.

( ...

) Il est évident, par exemple, que les qualités esthétiques, positives, indéniables et parfois très remarquables, d'une automobile, d'un avion, d'un écouteur téléphonique, d'un barrage pour station hydro-électrique, ne sauraient en rien (dans l'esprit moderne) résulter d'ornements surajoutés, ni d'une intervention de l'artiste professionnel se substituant à l'ingénieur pour en corriger ou pour en remanier l'ouvrage, pour le« surdéterminer4 ».

Elles sont inhérentes à ces choses mêmes, directement, en tant qu'elles sont « réussies» ou« accomplies» ou« parfaites en leur genre»; en tant que leur forme est excellente, bien adaptée à la fonction.( ...

) En les créant, l'ingénieur a fait à la fois et par un même acte, par une même démarche, œuvre d'indus­ trie et œuvre d'art.

Étienne Sou RIAu, Passé, présent, avenir du problème de l'esthétique industrielle, Revue d'Esthétique, IV, Presses Universitaires de France, Paris, 1951, 1.

(sing.

leitmotif) : thème musical par extension, idée directrice.

-2.

Art de gouverner les machines à auto-régulation et science de ces machines; le terme est employé ici pour désigner l'homme en tant que machine à penser et à se gouverner.

-3.

Ici, phénomène accessoire et surajouté; l'épiphénoménisme est une théorie qui fait de la conscience le reflet inefficace des processus organiques.

-4.

Ajouter des significations supplémentaires.

SUJETS DE RÉFLEXION 1 f Quels sont les caractères du « style moderne né du progrès industriel »? 2 / Expliquer : « musique plastique ».

3/ Expliquer la phrase: « et tous les détails relatifs à la cybernétique ( ...

) qui en couvrent les murs ».

4/ Comment comprenez-vous la notion « d'art impliqué »? 5 f ~tes-vous d'accord avec SouRIAU qui affirme que l'ingénieur doit faire « à la fois et par un même acte, par une même démarche, œuvre d'industrie et œuvre d'art »?. »