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L'homme est-il responsable de son histoire ?

Publié le 09/02/2004

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histoire
Histoire Du grec historia, « enquête ». Ce mot recouvre principalement deux significations, que la langue allemande distingue : le devenir historique lui-même, comme ensemble d'événements (Geschichte), et la connaissance du passé que l'historien essaie de constituer (Historie).La première signification pose le problème du sens et de la finalité de l'histoire ; la seconde, celui de la scientificité de la discipline de l'historien. À considérer la succession des époques historiques et leur cortège de guerres, de dévastations, de trahisons puis de réconciliations, on peut douter que l'histoire soit autre chose qu'un chaos sans aucun sens. L'écrivain Paul Valéry le dit sur un ton définitif : « L'histoire justifie ce que l'on veut. Elle n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout. » De par son caractère englobant et universel, l'histoire serait donc pourvoyeuse des plus grands crimes et des plus belles réussites, individuelles ou collectives, des plus grands espoirs comme des désespoirs les plus profonds.Mais, contenant tout et son contraire, l'histoire apparaît dès lors comme un devenir indéterminé et contingent dont le cours s'orienterait selon la bonne ou la mauvaise volonté des hommes. Il s'agirait alors, pour que l'histoire ait un sens, que les hommes le veulent et qu'ils entreprennent collectivement de lui en donner un. N'est-ce pas d'ailleurs la meilleure façon, pour un individu, de donner sens à son histoire : se fixer un but (une finalité) et mettre en oeuvre les moyens qu'il exige (en termes de travail.

Un flou semble être laissé en première instance sur l'histoire dont proprement il s'agit. Est-ce l'histoire propre, le passé de l'homme sur lequel il s'agit de mener la réflexion, c'est-à-dire sur son passé personnel, la trame qu'à lui seul il produit à chaque instant que ce soit par volonté libre ou par accident? Ou s'agit-il encore de l'histoire globale de la région du monde dans laquelle il s'insère, ou, d'une manière encore plus étendue, l'histoire du monde qui s'élance de l'invention de l'écriture jusqu'à sa propre existence contemporaine? L'adjectif possessif « son « – il s'agit dans le sujet de parler de « son « histoire – pourrait nous orienter vers cette mienneté, soit l'histoire marquée irrémédiablement du sceau d'un sujet particulier. Il s'agirait de mon histoire propre, la mienne précisément dont je serai responsable, c'est-à-dire dont je devrai répondre (l'étymologie du terme responsabilité nous orientons vers le latin re-spondeo qui signifie répondre, répondre de). Notons que pour répondre de quelque chose, encore me faut-il connaître cette chose, c'est-à-dire être rattaché à la série des choses sur lesquelles je dois me prononcer. D'ailleurs, le terme grec Iστορια signifie recherche, information, soit connaissance, c'est-à-dire « relation de ce qu'on sait «. Je répond ainsi de ce que je sais de moi, de ce qui m'est arrivé, de mon aventure. Ce dernier terme est important puisque, si l'histoire peut renvoyer à la mémoire, soit proprement à ce qui est arrivé, on remarquera que cette notion ne fait pas exclusivement la promotion du passé. En effet, on peut ainsi dire: « je suis impliqué dans une sale histoire «, soit une histoire qui se vit au présent, une série d'évènements qui se tiennent entre eux et s'articulent autours de ma subjectivité propre. Cependant, on remarquera que la notion d'histoire, même dans ce cas présent ne peut être entièrement rabattue du côté de la subjectivité, sans faire de celle-ci un empire dans un empire. De toute évidence, le sujet est imbriqué voire impliqué dans un cours plus vaste, celui de l'histoire globale, de la région où il se situe jusqu'au monde où il se tient. L'homme est irrémédiablement plongé dans un monde où l'autre fait figure d'horizon, ou plus exactement les autres, entendons les autres hommes qui participent massivement à l'aventure du monde, modestement, de manière insignifiante, ou d'une manière plus marquée. Il y a une co-implication entre ces deux trames (histoire personnelle et histoire globale) qui ne peuvent jamais être conçue comme extérieur l'une à l'autre. Le destin globale s'alimente des tracés particuliers, tout comme l'aventure personnelle émerge dans les crêtes des vastes mouvements globaux. La question étant alors de savoir s'il est possible au sujet particulier de répondre de mouvements plus vastes qui gouvernent en partie et dessinent les reliefs de son chemin particulier? De toute évidence, aucun sujet n'est omniscient, capable d'une véritable com-préhension radicale qui consisterait à faire sien le tout dans lequel il s'insère.

 

histoire

« I. Être capable de répondre de l'histoire du monde paraît de toute évidence unetâche impossible.

Nietzsche nous oriente vers l'idiotie d'une telleconsidération, une considération où le monde pèserait irrémédiablement surles épaules du sujet au point de l'écraser de tout son poids.

Ce poids, c'estcelui qui empêche l'être de toute démarche créatrice, l'enferrant pour ainsidire dans l'inertie.

Mais, si cela vaut du point de vue d'une histoire générale, ilfaut penser la même chose d'une histoire resserrée au stricte point de vuepersonnelle.

Dans ses Considérations intempestives sur l'histoire , Nietzsche nous rappelle cette nécessité pour l'homme d'être capable d'oublier sonhistoire pour ne pas qu'elle devienne indigeste au point d'entraver sadémarche.

Que ce soit sur le plan objectif ou subjectif, la vénération del'histoire doit pouvoir trouver une limite.

En effet, toute création nécessitequelque part d'être injuste avec le passé, de l'oublier ou de le saccager unpeu.

Il faut parfois s'émanciper de la tradition, des icônes d'une civilisation,remettre l'héritage en question pour tenter de créer du neuf.

Sous quel cassinon, « ce poids l'accable ou l'incline sur le côté, il alourdit son pas, tel un invisible et obscur fardeau ».

Il s'agirait donc d'être comme cet enfant « qui n'a encore rien à renier du passé et qui, entre les enclos d'hier et ceux dedemain, se livre à ses jeux dans un bienheureux aveuglement ». Tout action a besoin nécessairement d'oubli.

De ce fait, être responsable detout, c'est encore rien ne pouvoir faire.

On comprend ainsi que « Il y a un degré d'insomnie, de rumination, de sens historique qui nuit à l'être vivant et finit par l'anéantir, qu'il s'agisse d'unhomme, d'un peuple ou d'une civilisation ».

Nietzsche se lève contre cette histoire antiquaire et donc poussiéreuse et pesante devant laquelle on pose le genoux à terre, empli de respect, sans la remettre en question.

D'un côté,nous sommes silencieux de respect devant ces vestiges du passé, et d'un autre côté, nous envions l'animal quidemeure « étroitement lié [...] au piquet du moment ».

Ce qu'il vit aujourd'hui, il l'oubliera dans un instant.

Au-delà du simple fait que cette vision de l'animal est aujourd'hui une éthologie périmée, nous saisissons le point de vuenietzschéen: nous voudrions oublier, ne plus être soucieux de ce qui pèse parfois sur notre conscience, et queNietzsche représente par la morsure d'un serpent, comprenons la morsure de la mauvaise conscience.

La culpabilité,cet affect triste, freine notre action d'un point de vue individuel, et ronge notre esprit. Que ce soit du point de vue générale ou particulier, l'artiste qui veut créer doit piétiner ce passé, être irrespectueuxenvers-lui.

Sans cela, il ne sera qu'un philistin cultivé nous dit Nietzsche, i-e celui qui déteste la nouveauté, qui vit sous le poids de la culture et des apports du passé sans jamais les remettre en question, angoissé de perdre sesrepères.

Les grands hommes doivent être capable de créer une rupture, un gouffre entre eux et le passé.

Mieux quesimplement l'enterrer, ils doivent par la suite le profaner, le traiter sans aucun respect, le violenter.

Ils doivent ensomme être injustes envers le poids de la tradition.

Ils ne répondent plus de rien si ce n'est d'une certaine histoire,l'histoire monumentale .

Elle appartient à l'artiste, à celui qui crée, et qui ne trouve rien qui soit à sa juste hauteur dans le présent et qui cherche ainsi remède dans le passé.

Engagé dans le monde, il se réfère au grands modèlespour à son tours devenir un exemple.

Mais encore une fois, il ne s'agit jamais de répéter, mais d'innover, de s'inspirerdes forces jadis à l'oeuvre, non des moules dans lesquelles elles se sont exécutées.

Il ne s'agit pas non plus d'êtrecritique envers le passé, car ce serait encore dépendre de lui d'une autre façon.

Ce qui compte par-dessus tout, c'est toujours la vie « cette force obscure, entraînante, insatiable, qui ne cesse de se désirer elle-même ».

Or la vie ne peut exprimer sa force lorsque l'histoire est justement I στορια , soit savoir : les hommes deviennent alors des encyclopédies ambulants. L'attitude face à l'histoire: entre culture et sort personnel II. Avec Nietzsche, on comprend que la culture n'est pas une simple érudition, une rumination d'idées déjà pensées il ya longtemps.

La vie, cette force qui bat en nous, et dont l'expansion correspond à notre bonheur exige la mise encause du passé, exige la condamnation de l'histoire.

On ne peut raturer l'histoire de toute évidence, précisémentparce qu'il ne s'agirait que d'une rature, soit un trait qui n'efface pas définitivement ce qu'il prétend nier.

Cependant,pour être capable d'édifier l'avenir, il faut s'élever contre ce que Nietzsche appelle une « micrologie » que trop attentive aux détails, qui morcellent le passé là où une vue d'ensemble serait nettement la meilleur perspective.

Onconvient donc que l'amnésie n'est pas une solution, tout en concevant que la culture ne se dissout pas dans uneconnaissance compilant les événement passé.

Il faut quitter la position du simple spectateur (ainsi que d'unepseudo-objectivité), et penser toujours en tant qu'acteur. Nous sommes restés jusqu'à présent dans le cadre de ce que l'on peut appeler avec Heidegger le point de vue del'historicité, soit la dimension existentielle du sujet ou la dimension ontique de l'histoire générale.

Mais peut-êtres'agit-il d'avancer pour pousser la réflexion au niveau de ce que Heidegger nomme dans Être et Temps l'analytique existentiale du Dasein.

Rappelons en ce sens, et dans un premier temps, les différents moments structurels duDasein comme être-au-monde (In der-Welt-Sein ).

L'étymologie du terme in dans l'expression allemande doit, nous explique Heidegger, nous renvoyer à innan qui signifie habiter, c'est-à-dire aussi être habitué à , familier de.

Dire que le Dasein est proprement au-monde signifie que le monde ne s'ajoute pas du dehors au Dasein, mais bien qu'il faitpartie de l'être du Dasein, que celui-ci séjourne auprès d'un monde familier.

Le Dasein cherche donc à être chez soi,et tout à la fois, il ek-siste, entendons par-là il est hors-de-soi, sans abri pour ainsi dire, préoccupé par cet éternel. »

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