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Que vaut, au point de vue moral, le principe: "La fin justifie les moyens" ?

Publié le 17/01/2022

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Sacrifier ne serait-ce qu'une vie humaine pour en sauver dix mille autres, c'est trahir une fois le principe moral au nom duquel on prétend justifier sa conduite. C'est donc réellement manquer à la fin qu'on déclare poursuivre. Pour de tels moralistes, on ne doit jamais et sous aucun prétexte faire le mal. Les Américains, donc, auraient eu tort de lancer la bombe d'Hiroshima qui fit tant de victimes innocentes. Mais si nous poursuivons cette attitude jusqu'à ses conséquences extrêmes, nous rejetterons aussi l'usage des bombes de calibre ancien - car il suffit, dans cette perspective, d'une seule victime innocente pour condamner l'acte guerrier ! Et nous dirons que les Américains auraient dû subir l'attaque de Pearl Harbour sans se défendre. Tel est d'ailleurs lé principe des non-violents et des objecteurs de conscience. Il s'agit ici d'une morale mystique qui veut préserver à tout prix la pureté de l'agent moral, quelles que soient les conséquences immédiates et lointaines pour le bonheur de l'humanité. C'est ainsi par exemple que Kant nous interdit de mentir même par charité. Car mentir c'est mal faire et la fin ne justifie pas les moyens. Kant condamnerait Mgr Myriel qui ment pour sauver Jean Valjean du bagne.
On vous demande ici d'évaluer un principe d'action : « la fin justifie les moyens «. Pour déterminer sa valeur morale, il faudra d'abord s'interroger sur le sens de ce principe, puis examiner quelles en sont les conséquences. Attention : on vous demande de réfléchir à la valeur morale de ce principe et non pas à son utilité pratique.

« En 1513, Machiavel , diplomate originaire de Florence, achève la rédaction du« Prince ».

Suite à un bouleversement politique à Florence, il avait été contraintd'abandonner ses fonctions et de se retirer.

Ilprofita de cet exil pour rédiger une sorte detraité expliquant à un chef politique la façon desauvegarder son pouvoir et même d'accéder àla gloire. L'idée d'un tel ouvrage, constitué par des conseils adressés à un prince, n'était pasneuve en elle-même.

Il existait déjà denombreux « miroirs des princes » et Machiavel s'insère donc dans une tradition.

Mais il rompitavec l'usage et provoqua le scandale par lamanière dont il aborda le problème.

On vit enlui une nouvelle incarnation de Satan et,aujourd'hui encore, quelques commentateurscontinuent de le considérer comme un « apôtre du mal ». Le discours humaniste du temps, que récuse Machiavel , s'inspirait des moralistes latins et notamment de Cicéron .

Pour ce dernier et ceux qui se rattachaient à sa pensée au XV ième, la gloire du chef reposait sur une bonne gestion allant de pairavec une conduite vertueuse, cad conforme aux exigences de la morale. Machiavel s'inscrit en faux contre cette thèse.

Le souci premier du Prince doit être de conserver son pouvoir et même de l'accroître à l'occasion.

Si les hommes étaient bons, il pourrait le faire sans jamaiss'écarter des grands principes moraux universellement admis.

Mais les hommes sont pour la plupartméchants quand on ne les force pas à être bons.

En conséquence, le Prince sera vertueux, au sens courantdu terme, si le contexte le permet, et il ne le sera pas si la situation le lui impose.

En cas de nécessité, ilpourra faire des entorses aux grands principes.

Il lui sera loisible d'agir contre la parole donnée, contre lacharité, contre l'humanité (le respect de l'homme) et même contre la religion.

La fin justifie les moyens. Cette idée est exprimée en plusieurs endroits du « Prince » et de « Discours sur la première décade de Tite-Live », et, en particulier, dans le chapitre XV du « Prince » : « Car qui veut entièrement faire profession d'homme de bien, il ne peut éviter sa perte parmi tant d'autres qui ne sont pas bons.

Aussi est-il nécessaire auPrince qui se veut conserver qu'il apprenne à pouvoir n'être pas bon, et d'en user oun'user pas selon la nécessité. ». Après avoir, dans les premières pages du « Prince », envisagé les différentes formes de gouvernement, Machiavel décide de centrer son propos sur la situation qui peut paraître la plus précaire, celle d'un prince nouveau et qui a été mis en placepar une armée étrangère.

Quels principes doit mettre en oeuvre ce prince pour seconserver et pour conserver son pouvoir ? Le « Prince » tout entier se propose de répondre à cette question. Machiavel pense que l'on peut tirer des leçons de l'histoire.

En étudiant le comportement des grands hommes, en analysant les causes de leurs échecs ou de leurs succès, il est possible de dégager lesprincipes sur lesquels pourra se fonder une action politique.

Sa conclusion est claire : on ne fait pas debonne politique avec de bons sentiments. Il n'est pas important pour le « Prince » d'être bon ou de ne pas l'être.

Celui- ci doit avoir la ruse du renard « pour connaître les filets » et la force du lion « pour faire peur aux loups ».

L'exemple à suivre est celui de l'empereur Sévère qui « fut un très féroce lion et un très astucieux renard ». « Il faut donc savoir qu'il y a deux manières de combattre, l'une par des lois, l'autre par la force ; la première forme est propre aux hommes, la seconde propre auxbêtes ; comme la première bien souvent ne suffit pas, il faut recourir à la seconde.Ce pourquoi est nécessaire au Prince de savoir bien pratiquer la bête et l'homme. » La même idée que la fin justifie les moyens est exprimée dans les « Discours » : « Un esprit sage ne condamnera jamais quelqu'un pour avoir usé d'un moyen hors des règles ordinaires pour régler une monarchie ou pour fonder unerépublique.

Ce qui est à désirer, c'est que si le fait l'accuse, le résultat l'excuse. ». »

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