Devoir de Philosophie

Sciences & Techniques: Génération spontanée : la longue histoire d'une idée vivace

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

histoire
La génération spontanée est l'idée selon laquelle les vers qui naissent dans le fromage naissent du fromage... Sérieusement mise en doute au XVIIe siècle, elle dut sa survie scientifique à sa capacité à se faire petite par la taille (on venait de découvrir les microbes) et grande par l'ambition ( la matière vaut bien Dieu).
histoire

« basilic bien pilée ; appliquez une seconde brique sur la première, et exposez le tout au soleil ; quelques jours plus tard, le basilicayant agi comme ferment, vous verrez naître de petits scorpions".

Quant à fabriquer des souris, "il n'est que de comprimer unechemise de femme - une chemise un peu sale de préférence - dans un vase garni de froment... " Des scorpions qui naissent dans les briques, des souris dans les chemises...Voilà qui fait sourire aujourd'hui.

Aux yeux des lecteursmodernes que nous sommes, la génération spontanée passe pour une théorie furieusement obscurantiste, archaïque, irraisonnée,non-cartésienne...

Et pourtant, première surprise de cette histoire en dents de scie, c'est aux philosophes rationalistes et aux librespenseurs qu'elle servira le mieux : Voltaire et Diderot la défendront.

Avant eux Descartes , persuadé que le monde est une mécanique, admettait très bien la génération spontanée.

Il expliquait que la chaleur, agissant sur des matières en voie de putréfaction, agite desparticules minuscules jusqu'à former un être organisé. Francisco Redi, avec ses expériences, ne parvenait d'ailleurs à contester que l'abiogenèse, c'est-à-dire l'apparition de vie à partir d'unematière inerte.

Il n'avait aucun moyen de réfuter l'hétérogenèse, c'est-à-dire la formation d'un être vivant à partir d'un matériau vivant.

Ilétait donc capable d'admettre ceci : "si une chose est vivante, elle peut produire un ver, il en est ainsi des cerises, des poires ou desprunes.

De la même manière suis-je enclin à penser que le ver solitaire et les autres vers que l'on trouve dans les intestins et lesautres parties du corps humain, se génèrent de cette façon ". Il laissera à ses successeurs, Malpighi (1628-1694), Swammerdam (1637-1680) et Vallisnieri (1661-1730) le soin de pousser plusavant ses théories.

Marcello Malpighi notamment montrera que le parasite de la galle du chêne n'est pas le produit, mais la cause decette maladie végétale.

Antonio Vallisnieri, médecin à Padoue, élève de Malpighi, refera les expériences de Redi et montrera avec plusde détail que "les insectes ne naissent de l'âme ni des plantes, ni des animaux, mais naissent tous des oeufs".

Il devint de plus enplus difficile de soutenir le contraire.

Comment, dans ces conditions, l'idée de la génération spontanée fit-elle pour survivre ? Enchangeant de niveau dans l'échelle des êtres. la vie dans une goutte d'eau Retournons un peu en arrière et quittons l'Italie pour les froidures du plat pays flamand.

En 1650, dans l'arrière-salle d'un drapier deDelft, un jeune homme de dix-huit ans vient de quitter ses livres de comptes.

Il se lève pour aller regarder sous les verres grossissantsdont se servent les drapiers quand ils examinent leurs tissus.

C'est son passe-temps favori.

Antonie van Leeuwenhoek a dûabandonner ses études à l'âge de seize ans à la mort de son père, et ce travail chez le drapier l'ennuie.

Seules les lentilles lepassionnent.

A tel point qu'il va, petit-à-petit, devenir maître dans l'art de les fabriquer, de les polir, de les monter.

Il fait desmicroscopes. Dès que l'occasion se présente, en 1660, il accepte un travail, certes modeste mais peu fatigant, d'huissier à la chambre desEchevins qui lui permet enfin de se consacrer entièrement à "sa" science.

Leeuwenhoek est, à côté de Redi, un magicien del'infiniment petit : il possède 419 lentilles dont la moitié est montée en microscope, et dont certaines sont faites de cristal de roche, etmême de diamant .

Il est parvenu à un grossissement de 270 fois.

Gouttes de sang, excrément de grenouille, tartre dentaire, œil de moustique, cendres de tabac, pépins d'orange...

Il fait défiler sous ses lentilles tout ce qui lui passe sous la main. Le 7 septembre 1674, cet explorateur de l'invisible écrit à la Société Royale à Londres : " à peu près à deux heures d'ici, il y a un lac à l'intérieur des terres dont le fond est marécageux ou tourbeux.

Son eau, en hiver, est très claire, mais au milieu de l'été, elle devientblanchâtre et il s'y trouve alors, flottant, de petits nuages verts ; ce qui, d'après les paysans, est causé par la rosée, et qu'ils appellentla miellée.

Cette eau est abondante en poissons savoureux.

Passant par là, à un moment où le vent soufflait plutôt fortement etvoyant l'eau telle que je viens de la décrire, j'en ai pris un petit peu dans une fiole de verre, et, examinant cette eau le lendemain, j'aitrouvé flottant dedans, des particules de terre et quelques bandes vertes enroulées en spirale à la façon des serpents.

Lacirconférence complète de chacune de ces bandes était à peu près de l'épaisseur d'un cheveu, il y avait aussi beaucoup de petitsanimalcules dont certains étaient arrondis alors que d'autres, un peu plus gros, étaient ovales.

Sur ces derniers, j'ai vu deux petitesjambes près de la tête et deux petites nageoires à l'extrémité du corps.

Ces animalcules étaient de différentes couleurs, certainsétaient blanchâtres et transparents, d'autres étaient verts avec de très petites écailles brillantes, d'autres gris.

Et les déplacementsdans l'eau de la plupart d'entre eux étaient si rapides, si variés, que j'avoue ne pas avoir pu m'étonner en les voyant.

Je juge que cescréatures étaient mille fois plus petites que les plus petites que j'avais vues dans la peau du fromage, la farine, le moisi et autres... " Leeuwenhoek vient d'accomplir un pas de géant.

Un nouveau champ de réflexion, tout à fait extraordinaire, s'ouvre aux scientifiques.Celui des êtres microscopiques.

Et ses découvertes relancent le débat sur la génération spontanée : il suffit de mettre une décoctionquelconque dans un bocal, fut-ce une eau de pluie limpide, pour voir apparaître, à la surface de cette infusion, ce qu'on identifiedésormais comme des animalcules, ou "infusoires"...D'où viennent-ils ? A cette époque, ni les adversaires, ni les défenseurs de la génération spontanée ne sont en mesure d'aborder la question de front.D'abord, parce qu'ils n'ont pas une vue établie du processus de fécondation.

D'étonnants et interminables débats les occupent, commecelui des préformistes contre les épigénistes, qui durera deux siècles. Les préformistes affirment que l'individu vivant provient d'un germe qui le contenait déjà tout entier, mais en miniature.

Les épigénistesen revanche pensent que les deux parents interviennent par l'apport d'éléments complémentaires, l' embryon se développant par différenciation successive de parties nouvelles. Au XVIIe siècle, les préformistes sont largement majoritaires, mais ils se divisent encore en deux camps.

Les ovistes, majoritaires,pensent que c'est dans l'œuf maternel que se situe ce germe préformé (chez la femme, l'embryon est dans l'ovaire).

Les spermistes,dont Leeuwenhoek fait partie, pensent que cet être miniature est dans le sperme et que " l'œuf n'a d'autre but que de servir de. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles