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Grand cours: L'HISTOIRE (a de f)

Publié le 22/02/2012

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histoire

  INTRODUCTION : FAUT-IL CHERCHER UN SENS A L’HISTOIRE ?

I) L’histoire : de quoi parlons-nous ?

1.     Recherche, travail préparatoire :

Le mot histoire est employé dans différents sens.  Ne dit-on pas : “ raconter une ou des histoires ”, “ faire des histoires ”, “ le cours de l’histoire ”, “ une histoire personnelle”, etc.

® Analyser l’usage du mot histoire dans chacune de ces expressions. Quels sont les points communs et les différences ?

Nous parlons du sens de l’histoire, du cours de l’histoire, de la fin de l’histoire. Quelles sont les significations de chacun de ces termes ?

Le sens de l’histoire : idée que l’histoire aurait une signification, une logique que l’on pourrait comprendre, et qu’elle ne serait pas soumise à un destin indépendant de la volonté des hommes ou livrée à la contingence, au pur hasard.

La fin de l’histoire : idée que l’histoire avancerait dans un certain sens, vers un certain but, vers une certaine fin. Conception d’une histoire orientée et en progrès.

Le cours de l’histoire : la suite des événements, le devenir de l’histoire.

Le mot histoire a plusieurs sens. Il  est dérivé d’un mot grec qui signifie enquête, récit. Or, un récit peut porter sur des événements fictifs aussi bien que sur des événements objectifs : on parle aussi bien de l’histoire du Petit chaperon Rouge (récit imaginaire, fictif) que de l’histoire de la France ou de la seconde guerre mondiale (histoire réelle, objective).

1.     A cela s’ajoute une autre ambiguïté :  le terme d’histoire possède deux significations principales. L’histoire de la France, par exemple, ne renvoie pas seulement à l’ensemble des événements passés qui ont affecté le sol et le peuple de France, mais aussi à la discipline, la science qui étudie ce passé. Il y a donc d’une part l’histoire qui est écrite par les historiens : son but est la connaissance du passé des sociétés humaines ou, comme l’écrit Raymond Aron, « la science que les hommes s’efforcent d’élaborer de leur devenir «. Il y a d’autre part l’histoire comme succession des événements historiques ou comme devenir de l’humanité.

2.     Le mot histoire peut donc signifier soit l'ensemble des changements, des événements qui ont eu lieu, soit la connaissance que l'on peut prendre du passé, le récit qui peut en être donné. L'histoire comme connaissance du passé et devenir historique.

Ces deux définitions sont, en réalité, liées.

En effet, si l'histoire est l'ensemble des changements qui se sont succédé dans les sociétés humaines dans tous les domaines d'activité - technique, économique, politique, religieux, artistique -, une histoire, quelle qu'elle soit, n'est connaissable qu'à partir du moment où des documents, des vestiges, des traces ont été consignés. L'histoire comme connaissance a elle-même d'ailleurs une histoire puisqu'elle n'a pas toujours existé et qu'elle s'est profondément transformée au cours des siècles (l'histoire de l'histoire : l'historiographie).

D'autre part, la conscience du passé est constitutive de l’existence historique : tant que nous n’avons pas conscience de ce que nous sommes et de ce que nous fûmes, nous n’accédons pas à la dimension propre de l’histoire. En cela, l’histoire comme connaissance est prise de conscience de l’humanité; elle tente de donner un sens et une valeur à l’action humaine. L'histoire correspond alors à l'exigence proprement humaine de garder la trace ou le souvenir de ce qui s'est passé, de donner un sens, une raison, une valeur à l'existence passée, présente et future (cf. Texte de Raymond Aron).

En ce sens, n’avoir pas d’histoire – comme cela s’est dit des animaux et des peuples primitifs – signifie simplement ignorer qu’on en a une. Le passé est alors à la fois le disparu (on ne saura sans doute jamais quelles furent les pensées des hommes de Neandertal) mais aussi le maintenu. Or, pour que le disparu soit pensé comme tel, encore faut-il qu’il soit maintenu comme disparu. 

II) Problématique : la question du sens de l’histoire

Cette ambiguïté du mot histoire renvoie d’abord au problème de la connaissance historique que nous examinerons dans un premier temps :  il s'agit de réfléchir sur le travail de l'historien, sur  la nature des vérités qu'il nous apporte, sur la temporalité qu’il met en oeuvre.

Elle renvoie également à la question du sens de l'histoire. Vouloir donner du sens à l’histoire,  c’est poser le problème non seulement d’une intelligibilité, d’un ordre des événements historiques mais aussi d’une direction, d’une orientation possible de l’histoire. L’idée d’un sens de l’histoire implique alors que les événements du monde ne sont pas désordonnés, que tous les hommes ont une commune destinée, même s’ils n’empruntent pas des chemins semblables.

Or, l'histoire, telle que l'historien nous la révèle, a-t-elle une signification profonde, une cohérence, un ordre, une direction ? Les tragédies de l’histoire ont-elles finalement servi  à réaliser des progrès ? Peut-on vraiment diriger cette histoire, ou doit-on la subir comme une fatalité ?

Cette notion d’un sens de l’histoire bute sur plusieurs difficultés.

Le spectacle apparent de l'histoire (les guerres, les conflits, les malheurs de toute sorte) peut donner à penser que les événements du monde sont désordonnées, que les faits et les gestes du passé ont lieu en pure perte, que les hommes, en empruntant des chemins dissemblables, n'ont aucune destinée commune. Les individus et les peuples semblent être les victimes impuissantes d’une histoire cruelle, insensée et sans auteur. Aujourd'hui, l’histoire semble être fatalité : la répétition des guerres et l’apparition de nouveaux et dramatiques problèmes de société suscitent un sentiment d’impuissance à l’égard du futur : la politique serait l’affaire des grands de ce monde et non des citoyens isolés; il semble qu’on ne puisse changer rien aux intérêts et aux passions qui jettent les hommes les uns contre les autres, au nom de leurs ethnies, de leurs Etats, de leurs religions, etc.

La notion de sens de l’histoire a été fortement compromise en notre siècle par sa mise en oeuvre politique, dans les Etats inspirés par le marxisme-léninisme : l’idéal d’une humanité réconciliée, qui semble sous-tendre la recherche d’un sens à l’histoire, s’est trouvé transformé en motif d’oppression idéologique.

Ce qui pose problème, dans l’idée d’un sens de l’histoire, c’est finalement l’idée d’une histoire orientée, finalisée, qui s’apparenterait à une religion du salut terrestre et qui pourrait justifier les pires folies exterminatrices. D’un autre côté, force est de constater que la débâcle des idéologies en notre fin de siècle expose les sociétés au désespoir nihiliste que  Nietzsche avait jugé insupportable : «  n’importe quel sens plutôt que pas de sens du tout  « (Généalogie de la morale, 3e dissertation, par. 28). L’idée d’un sens de l’histoire n’est-elle pas alors nécessaire pour penser l’histoire et l’action humaine ?

La question : « Faut-il chercher un sens à l’histoire ?  « revêt donc un enjeu de toute première importance, enjeu  à la fois métaphysique, politique et éthique. Comment, en effet, penser le sens et le progrès historique sans tomber dans le nihilisme, le dogmatisme, le scientisme ou le totalitarisme ? 

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